Turquie : Une solidarité subite avec les Palestiniens qui cache des appétits pétroliers12/10/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/10/une2254.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Turquie : Une solidarité subite avec les Palestiniens qui cache des appétits pétroliers

Le Premier ministre turc Erdogan s'est taillé une nouvelle popularité dans les pays arabes, en particulier depuis que la Turquie, longtemps alliée de l'État d'Israël, a pris ses distances d'avec celui-ci.

Dénonçant la politique d'Israël à l'égard des Palestiniens, la Turquie a participé il y a deux ans à l'expédition humanitaire vers Gaza en tentant d'y envoyer le navire Mavi Marmara, dont neuf passagers turcs ont alors été tués par les commandos israéliens. Et début septembre, constatant qu'Israël refusait toujours toute excuse à ce sujet, le gouvernement turc a décidé de renvoyer son ambassadeur.

Le ministre des Transports turc a même rappelé à l'ordre Israël en déclarant qu'il se comporte dans cette région « comme les pirates dans le golfe d'Aden. » Et d'ajouter que « personne n'a le droit d'annexer ces eaux. Ceux qui le font recevront une réponse de notre part ».

Pourtant, depuis plus de soixante ans qu'existe l'État d'Israël, la Turquie ne s'était guère montrée sensible au sort des Palestiniens, mais plutôt avant tout l'alliée des États-Unis et de leur allié israélien. Ce changement récent est à mettre en liaison avec les tentatives du gouvernement Erdogan de faire jouer à la Turquie un rôle central dans les conflits du Proche-Orient, en en faisant l'interlocuteur de tous les gouvernements sur les plans diplomatique et surtout commercial, l'industrie turque plaçant désormais ses produits sur tous les marchés, des Balkans à l'Asie centrale.

Mais à cela s'ajoutent maintenant des intérêts encore plus directs. En effet, des réserves très importantes de gaz et de pétrole ont été découvertes au sud de Chypre. Selon la presse chypriote grecque, des accords secrets auraient été signés en 2008 entre le gouvernement de Chypre, la compagnie américaine Noble Energy International et une compagnie israélienne, cet accord excluant totalement les Chypriotes turcs et la Turquie. Et malgré ses multiples tentatives d'être associée à cet accord, la Turquie n'a rien obtenu.

Le gouvernement turc a donc décidé de passer à un stade supérieur en menaçant d'agir militairement. En effet, en décembre 2010 Israël et Chypre ont signé un accord pour délimiter leurs frontières en mer et les zones d'exploitation d'hydrocarbures, excluant la Turquie de ce partage. « Nous ne laisserons pas Israël exploiter seul les ressources de la Méditerranée. Ils ne pourront pas s'arroger ce droit. Nous avons pris des mesures », a donc déclaré Erdogan. Et le ministre israélien de l'Énergie de répondre qu'« Israël soutiendra et sécurisera ses plates-formes en Méditerranée ».

La tension est donc en train de monter. La Turquie a récemment signé des accords avec la République turque de Chypre-Nord (RTCN) et a commencé ses propres travaux d'exploration près de Chypre. Des avions militaires turcs et américains survolent la zone où des forages ont déjà commencé. La presse chypriote fait état du fait que le gaz sortira des profondeurs dès fin décembre et que déjà plus d'une dizaine de compagnies pétrolières auraient fait des démarches auprès du gouvernement de Chypre pour se partager l'exploitation !

On le voit, le changement d'attitude du gouvernement turc cache bien des calculs, et le peuple palestinien aurait tort de trop se fier à cette solidarité tardive et très intéressée.

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