Éric Ciotti et les prisons : Chasse aux voix sur l'air de la sécurité08/06/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/06/une-2236.gif.445x577_q85_box-0%2C14%2C163%2C226_crop_detail.png

Leur société

Éric Ciotti et les prisons : Chasse aux voix sur l'air de la sécurité

« Cinquante propositions pour une meilleure efficacité de l'exécution des peines », tel est le titre du rapport remis à Sarkozy par Éric Ciotti, prétendument pour « redonner du sens » à la sanction pénale mais, assurément, pour tenter de récupérer des voix sur un terrain bien crasseux.

Éric Ciotti n'est pas novice en la matière. Député UMP et président du Conseil général des Alpes-Maritimes, il est celui qui a réussi à équiper, à trois près, la totalité des collèges de son département en caméras de vidéosurveillance. Nommé Monsieur sécurité de l'UMP quelques semaines avant les dernières élections européennes, il fut aussi rapporteur de la loi sur « les violences en bande », puis de celle pour « la performance de la sécurité intérieure ». Et son plus grand fait d'armes est sans doute d'avoir proposé en août 2010 de punir de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le père ou la mère d'un enfant mineur poursuivi ou condamné pour une infraction et qui le laisserait à nouveau « violer les interdictions et les obligations auxquelles il est soumis ».

Aujourd'hui, parmi les cinquante propositions qu'il commet, Ciotti demande la suppression des réductions automatiques de peine (trois mois d'incarcération en moins la première année et deux mois par année suivante) qui permettent aux prisonniers qui se comportent correctement de voir leur emprisonnement réduit. Il propose de revenir sur le système des aménagements de peine pour les personnes condamnées à moins de deux ans de prison, et de le limiter à celles qui sont condamnées à moins d'un an. Il plaide pour l'instauration d'une « durée intangible » de la période de condamnation, pour un retour des travaux d'intérêt général et aussi, pour les mineurs récidivistes, à un service civique sous contrôle militaire, en quelque sorte un remplacement des éducateurs par les caporaux.

Tout le rapport est un réquisitoire visant à remplir les prisons. Mais comme les prisons débordent déjà, avec 64 584 prisonniers pour 56 150 places, il en appelle à la création de nouvelles structures de détention, en reconvertissant les anciennes casernes militaires désormais inutilisées, voire en louant des immeubles privés et même, propose le rapport, en construisant des « structures modulaires légères », pour parvenir à 80 000 places en 2018. Et le rapporteur de se lamenter, graphique à l'appui, de ce que la France est, tout juste après l'Allemagne, le pays européen où le taux de détention pour 100 000 habitants est le plus faible, loin derrière la Pologne, l'Espagne, le Royaume-Uni... Et que tout cela serait « en raison d'une insuffisance de notre capacité carcérale ».

Le rapport est évidemment totalement vide de toute considération sur les conditions exécrables de vie dans les prisons, la promiscuité, la terreur qui y règne parfois, le mépris de la dignité des prisonniers qui y sévit toujours et l'absence de possibilité réelle de formation pour la réinsertion. Un seul objectif y préside : la volonté de caresser dans le sens du poil les adeptes du tout-sécuritaire attirés par les sirènes de la droite extrême.

Sophie GARGAN

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