Croatie : Le pape en croisé de la réaction08/06/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/06/une-2236.gif.445x577_q85_box-0%2C14%2C163%2C226_crop_detail.png

Dans le monde

Croatie : Le pape en croisé de la réaction

En visite pour deux jours en Croatie, pays censé être le bastion du catholicisme dans des Balkans majoritairement orthodoxes, le pape a une nouvelle fois enfourché ses thèmes de prédilection réactionnaires.

Lors d'une messe à grand spectacle à Zagreb, la capitale croate, Benoît XVI a dénoncé la « christianophobie », la « désintégration croissante de la famille, notamment en Europe », l'avortement, le concubinage et le contrôle des naissances.

À ces grands classiques du Vatican, il a ajouté un hommage appuyé au cardinal Stepinac, inhumé dans la cathédrale de Zagreb, dont il a loué le « vrai humanisme chrétien ».

Cet « humaniste », donc, fut nommé archevêque en 1937, alors qu'il n'avait pas 40 ans : une entorse au droit canon, paraît-il, résultant d'un choix politique de Pie XI. Le Vatican se tenait alors aux côtés des dictatures antiouvrières les plus infâmes d'Europe, de leurs suppôts tels Franco ou Hitler, et de tous ceux qui communiaient dans l'anticommunisme.

Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclata et que la Yougoslavie fut dépecée, Stepinac soutint le nouvel État croate allié de l'Allemagne nazie et son chef, Ante Pavelic, fondateur du mouvement d'extrême droite oustachi. Malgré ou à cause de nombreux massacres de Juifs, de Serbes et de Roms par les oustachis, Stepinac maintint d'étroites relations avec Pavelic et son régime, pour lesquels il appela à prier.

Puis, sans doute touché par la charité, ou plutôt sentant le vent tourner, il fit savoir qu'il n'était « pas possible de persécuter les Gitans et les Juifs parce qu'ils sont supposés être de race inférieure », sans toutefois rompre jamais avec le régime. En 1946, dans la Yougoslavie de Tito, Stepinac fut condamné pour collaboration.

Béatifié par Jean-Paul II en 1994, Stepinac serait en voie de canonisation, comme le réclame l'Église croate. Une Église qui, lors des guerres dues à l'éclatement de la Yougoslavie en 1991, soutint les généraux croates et leurs massacres, puis cacha le général Gotovina, poursuivi comme criminel de guerre par le Tribunal pénal international. Et depuis, elle ne se gêne pas pour dire à ses ouailles comment et pour qui voter lors des élections, pour intervenir dans l'adoption des lois, tout en se moquant comme d'une guigne des problèmes réels d'une population écrasée par le chômage et les effets de la crise.

Il y a eu des protestations en Croatie face aux deux millions d'euros dépensés pour accueillir Benoît XVI, et même une manifestation : encore des témoignages de cette « christianophobie » de mécréants ne comprenant rien au « vrai humanisme ».

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