Justice : Une situation calamiteuse30/03/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/04/une-2226.gif.445x577_q85_box-0%2C9%2C172%2C231_crop_detail.png

Leur société

Justice : Une situation calamiteuse

Les magistrats et les fonctionnaires de justice ont manifesté le 29 mars un peu partout en France, contre la situation catastrophique des tribunaux et pour réclamer un plan d'urgence.

À Paris, l'Observatoire justice, qui regroupe les syndicats et des non-syndiqués parmi les magistrats et les fonctionnaires, vient de publier un Livre blanc sur le fonctionnement du tribunal de grande instance (TGI).

Le manque de moyens matériels est flagrant : locaux vieillots ou même insalubres, photocopieuses en panne, ordinateurs obsolètes ou micros hors service, entraînant parfois le report d'un procès. Mais c'est surtout le manque d'effectifs qui rend la situation insupportable pour le personnel, et encore plus pour les justiciables. Et cela touche particulièrement les personnes les plus modestes. En procès pour se faire reconnaître un droit, une pension, une garde d'enfant ou pour toute autre raison, elles risquent d'attendre bien longtemps qu'on leur rende justice.

Les services fonctionnent à coups d'heures supplémentaires : 20 000 heures en 2009 à Paris, plus de 15 000 en 2010. Il manque 20 % de postes de fonctionnaires et les greffes sont surchargés, travaillant six voire sept jours sur sept et terminant les audiences le samedi dans la nuit. Les juges d'application des peines sont paraît-il au complet, mais chacun devrait suivre plus de mille personnes en milieu ouvert.

La situation est identique ailleurs. En Alsace, 10 % des postes dans les greffes ne sont pas pourvus. À Bordeaux, le regroupement de plusieurs juridictions a entraîné la disparition de onze postes. Partout, les seules « embauches » sont celles de vacataires pour trois mois non renouvelables.

Faute de greffiers, on compte plusieurs mois de retard dans la frappe des jugements qui, du coup, ne peuvent pas être exécutés : Colmar, où 800 dossiers sont en souffrance et où on compte huit mois de retard pour la publication des jugements, n'est qu'un exemple parmi d'autres. Le Livre blanc reconnaît que cette situation « se traduit pour les justiciables par des incompréhensions, des erreurs, des retards » et qu'ils ne peuvent faire réellement valoir leurs droits. Comme, de plus, le ministère paie les avocats de l'aide juridictionnelle 30 euros de l'heure, que les interprètes ne sont payés au mieux qu'au bout de six mois, on peut parier que les personnes les plus modestes auront encore plus de mal à se faire entendre et à se faire comprendre, dans un univers déjà très opaque.

L'intersyndicale des magistrats et des fonctionnaires réclame une augmentation de deux milliards d'euros du budget annuel, pour que le fonctionnement de la justice soit à la hauteur de celui des autres pays européens. Le ministre de la Justice vient de leur annoncer la création de 485 postes de magistrats et de greffiers. C'est ridicule par rapport aux besoins, mais c'est l'aveu que la suppression permanente des postes dans un service public aboutit à une impasse.

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