Paris-Tripoli : 1,5 million d'euros qui doivent sortir de quelque part09/03/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/03/une-2223.gif.445x577_q85_box-0%2C14%2C164%2C226_crop_detail.png

Leur société

Paris-Tripoli : 1,5 million d'euros qui doivent sortir de quelque part

Samedi 5 mars les douaniers de l'aéroport parisien du Bourget ont saisi 1,5 million d'euros en liquide, dans un avion en provenance de Tripoli et affrété par les autorités libyennes. Outre Ziad Takieddine, l'homme qui convoyait l'argent, l'avion ramenait en France deux journalistes du Journal du Dimanche qui venaient d'interviewer le colonel Kadhafi en personne.

Ziad Takieddine n'est pas tout à fait un inconnu. Son nom est cité dans l'affaire de la vente des sous-marins au Pakistan, en 1994, des commissions versées à cette occasion qui se seraient retrouvées dans les caisses de la campagne présidentielle de Balladur, de l'arrêt présumé du versement de ces commissions sur ordre de Chirac et de l'assassinat de onze salariés français au Pakistan qui en aurait découlé.

Si Ziad Takieddine nie toute participation à l'affaire des sous- marins, il se targue d'avoir, la même année, facilité la vente de frégates à l'Arabie saoudite et d'avoir touché 300 millions de francs pour ces bons offices. Le fait qu'il ait dû, selon ses dires, insister auprès de Chirac pour être payé et que les capitaux aient transité par une banque libanaise appartenant au président Hariri, ami de Chirac, n'est qu'une péripétie.

Il a également participé, en 2007, avec Guéant, désormais ministre de l'Intérieur, à la libération des infirmières bulgares détenues en Libye. Ce n'était que la partie visible d'un marché qui comprenait également le voyage de Kadhafi en France et, surtout, l'achat par ce dernier des Rafale de Dassault. L'affaire ne s'étant pas conclue, on ne sait rien des commissions éventuelles touchées par l'intermédiaire.

Peut-être a-t-il encore joué ce rôle de « facilitateur » dans d'autres affaires, car son métier est de bien connaître et de mettre en relation les acheteurs d'armes, fussent-ils les pires des dictateurs, les marchands de canons et les politiciens français, dont la bénédiction, pas toujours gratuite, est indispensable à ce type de marché.

L'utilisation de professionnels de la corruption, la complicité obligatoire des gouvernements, l'opacité des circuits financiers liés aux ventes d'armes sont à la mesure de la place des industriels français sur ce marché : dans les premiers !

Malgré les soupçons qui pèsent sur l'origine des billets arrivés au Bourget, la garde à vue du convoyeur de fonds a été de courte durée. Sans doute Ziad Takieddine a-t-il su convaincre les douaniers qu'il avait gagné la somme au Derby de Tripoli. À moins qu'ils aient reçu un coup de fil d'un témoin de moralité, aussi convaincant que haut placé.

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