La vague de révolte dans le monde arabe : Les peuples ne se contenteront pas d'apparences23/02/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/02/une-2221.gif.445x577_q85_box-0%2C9%2C172%2C231_crop_detail.png

Dans le monde

La vague de révolte dans le monde arabe : Les peuples ne se contenteront pas d'apparences

Après la Tunisie et l'Égypte, le Yémen et Bahreïn, l'onde de révolte qui secoue le monde arabe a touché la Libye. La répression des manifestations y a déjà fait des centaines de morts, mais elle n'a pu empêcher qu'une partie du pays échappe au pouvoir central et passe sous le contrôle des manifestants insurgés. Le colonel Kadhafi, qui exerce sa dictature sur le pays depuis 42 ans, n'en a pas moins proclamé dans un véritable délire qu'il ne quitterait pas le pouvoir et ferait couler le sang autant qu'il le faudrait.

En Tunisie et en Égypte, suite à l'explosion populaire, les pressions des États-Unis avaient réussi à pousser vers la sortie les dictateurs en place, Ben Ali et Moubarak, permettant à l'armée de se présenter comme la garante d'une « transition démocratique ». Le but était de sauver l'essentiel pour les tenants de ces régimes, pour les capitalistes locaux et occidentaux qui prospèrent depuis des années dans ces pays sur le dos des peuples. L'armée, en prenant ses distances avec les dictatures finissantes, s'est donné les moyens d'assurer la continuité du pouvoir, quitte à tenter de donner à celui-ci quelques apparences démocratiques. Mais visiblement, le dictateur libyen, lui, est bien moins sensible à ces pressions et n'est pas prêt à laisser la place, même si cela doit entraîner des flots de sang et surtout au risque d'entraîner l'éclatement de l'armée qui semble-t-il a déjà commencé, voire celui de l'État libyen lui-même.

Les protestations des dirigeants occidentaux n'en apparaissent que plus hypocrites encore, s'agissant d'un régime sur lequel ils se sont appuyés sans vergogne, non seulement pour permettre à leurs capitalistes de conclure des affaires d'or, mais pour maintenir l'ordre et pour contrôler cette partie de la Méditerranée et de l'Afrique. Ces protestations cachent mal leur inquiétude à l'idée que la fin du régime n'entraîne une période d'instabilité et que la Libye cesse de contrôler les flots de candidats à l'émigration que Kadhafi, d'accord avec les dirigeants européens, empêchait de prendre la mer, jetait dans des camps de concentration ou laissait mourir dans le désert. Si Kadhafi a pu menacer les dirigeants occidentaux, au cas où ils auraient cessé de le soutenir, de lâcher les vannes de l'émigration vers l'Europe, c'est que son cynisme n'a d'égal que celui dont la France, l'Italie, la Grande-Bretagne, les États-Unis ont fait preuve en appuyant sciemment sa dictature.

C'est pourquoi, même si la chute de Kadhafi se produit dans les prochains jours, tout sera loin d'être résolu pour la population pauvre, pour les travailleurs, non seulement de Libye mais de tout le monde arabe. Les classes dirigeantes de ces pays ont eu recours pendant des années à des dictatures féroces pour garantir l'exploitation de leurs peuples, non seulement à leur propre profit mais à celui des grandes sociétés occidentales, pétrolières ou autres. Face à la vague de révolte qui parcourt leurs pays, elles ont besoin maintenant de changer quelque peu le visage de cette domination. Mais même si la manoeuvre réussit, cela ne se fera pas sans problèmes et sans ouvrir une période d'instabilité ; l'exemple libyen le montre, mais pas seulement lui.

En Tunisie, en Égypte et ailleurs, les peuples ne sont certainement pas prêts à se contenter d'apparences. Pour les travailleurs, pour les masses pauvres de toute la région, ce n'est peut-être que le début d'une prise de conscience de leurs propres intérêts, de leurs intérêts de classe et des moyens de les défendre. S'il en est ainsi, les capitalistes locaux ou occidentaux et les dirigeants impérialistes n'auront pas fini de se faire du souci.

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