Portugal : Élection présidentielle Les électeurs ont boudé les urnes26/01/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/01/une-2217.gif.445x577_q85_box-0%2C8%2C173%2C232_crop_detail.png

Dans le monde

Portugal : Élection présidentielle Les électeurs ont boudé les urnes

Dimanche 24 janvier, le président de la République Annibal Cavaco Silva (Parti Social-Démocrate, de droite) a été réélu dès le premier tour avec 52,9 % des votes exprimés. Cela représente à peine 22 % des électeurs inscrits, car l'abstention a atteint 52,4 %, les bulletins blancs et nuls 6,2 %. Jamais un président portugais n'a été élu avec si peu de voix.

Le candidat du Parti Socialiste et du Bloc de Gauche, Manuel Alegre, a réuni 19,8 % des voix, moins que les 20,7 % qu'il avait obtenus en 2006. Le candidat du Parti Communiste, Francisco Lopes, a obtenu 7,1 %, les deux tiers seulement du pourcentage du PCP aux législatives de 2009 et à la présidentielle de 2006. Par ailleurs 14,1 % des suffrages se sont portés sur Fernando Nobre, candidat indépendant qui dirige une ouvre d'assistance médicale. Ce pourcentage inattendu ajouté à l'indifférence des abstentionnistes traduit une défiance à l'égard de la politique et des partis. Car ce n'est pas les élections qui préoccupent la majorité des Portugais, mais le chômage et la misère que les gouvernants sont bien incapables de combattre, quand ils ne les favorisent pas par leur politique en faveur des patrons et des riches.

Le chômage a dépassé 11 % et 600 000 personnes. Il n'y a pas de jour où une entreprise ne ferme, privant de ressources quelques dizaines ou quelques centaines de travailleurs supplémentaires. Les usines du textile et de la chaussure ont fermé, transformant en déserts industriels les régions proches de Porto où elles étaient installées. Il n'y a plus guère d'emplois, dans cette région du nord à la population très dense. Les ouvriers partis travailler en Espagne dans le bâtiment sont rentrés, après l'effondrement total de ce secteur, et de ce fait l'émigration n'est plus une solution car le chômage frappe partout.

Même le fait d'avoir un emploi ne protège pas de la misère. 500 000 travailleurs pauvres ne peuvent offrir à leur famille des conditions de vie décentes. Un quart des jeunes de moins de 18 ans vivent en dessous du seuil de pauvreté. Dans les statistiques concernant la pauvreté et les inégalités, le Portugal côtoie la Roumanie ou la Lettonie. Les salaires tombent souvent en dessous du smic (485 euros), du fait du travail faussement indépendant et du travail à domicile.

La baisse de 5 % de la masse salariale dans le secteur public et assimilé va se traduire à la fois par des suppressions d'emplois et par des diminutions de salaire. Ainsi, la Carris, société chargée des autobus et tramways de Lisbonne, a présenté un plan de 150 suppressions d'emplois « par accord mutuel ».

L'éducation et la santé aussi sont menacées. Le pays manque de médecins et de lits en hôpital, en particulier au sud, dans l'Alentejo. Le système de santé public est au bord de l'effondrement, tandis que les cliniques privées prospèrent. Quant à l'éducation, le niveau reste très bas. L'abandon scolaire atteint 35,4 %, le double de la moyenne dans l'Union européenne. Seulement un quart des adultes ont terminé le lycée.

Tous ces problèmes vont s'aggraver avec les mesures d'austérité appliquées cette année : gel des retraites, baisse du RMI, passage de la TVA de 21 à 23 %, baisse des transferts de l'État aux villes et districts. Plusieurs villes du nord ont cessé d'éclairer les rues après minuit, mais les économies ne pourront se limiter à cela. Dans le même temps, de plus en plus de gens sont contraints de recourir aux banques alimentaires et aux ouvres d'assistance.

Telles sont les raisons de cette abstention massive à l'élection présidentielle de dimanche. Mais il faut souhaiter que la population laborieuse ne s'en tienne pas à ce rejet des politiciens qui l'ont trahie, mais intervienne directement dans la vie politique et se batte pour composer ses propres réponses à la crise - car au Portugal comme partout, les travailleurs et les classes laborieuses n'ont pas à payer pour la crise des capitalistes.

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