Mediator : Les laboratoires Servier bien servis par l'État19/01/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/01/une-2216.gif.445x577_q85_box-0%2C8%2C173%2C232_crop_detail.png

Leur société

Mediator : Les laboratoires Servier bien servis par l'État

À son arrivée au ministère de la Santé en novembre, Xavier Bertrand avait pris les devants. Pour tenter d'éviter d'être éclaboussé par l'affaire, il avait dit souhaiter faire toute la lumière sur l'affaire du Mediator et commander un rapport à l'Institut général des affaires sociales. Ce rapport, qui vient d'être publié, se prononce clairement sur l'inefficacité et la dangerosité du Mediator.

Il dénonce l'attitude des laboratoires Servier, qui auraient même « roulé dans la farine » certains responsables des commissions de l'État. Il accuse toute la chaîne de contrôle des médicaments d'avoir échoué à éviter l'utilisation de ce produit inutile et dangereux, l'expliquant en partie par les liens financiers entre certains experts médicaux ou hauts fonctionnaires et les laboratoires, et reprochant aux responsables politiques de ne pas s'être rendu compte de cette situation. Enfin le rapport affirme que le retrait du Mediator aurait dû être décidé dès 1999.

Ainsi un médicament dangereux est resté utilisé et même remboursé par la Sécurité sociale pendant dix ans, alors qu'il y avait suffisamment d'éléments scientifiques pour décider son interdiction. Ce rapport ne fait sans doute pas toute la lumière, mais il donne suffisamment d'éléments pour comprendre que les représentants de l'État ont bien plus défendu les intérêts des laboratoires que ceux des patients.

« S'il y a des victimes, c'est parce qu'il y a un laboratoire qui a causé des victimes », a dit Xavier Bertrand commentant ce rapport, obligé de reconnaître qu'il porte lui-même une part de responsabilité. Il promet une indemnisation des victimes et une refonte complète du système de mise sur le marché et de surveillance des médicaments.

Xavier Bertrand était effectivement déjà ministre de la Santé entre 2005 et 2007, et il est donc au moins responsable d'avoir laissé en place à l'époque toute la chaîne de contrôle des médicaments qu'il prétend dénoncer aujourd'hui. Soit il était incompétent, soit il n'a pas voulu toucher aux intérêts des grands groupes de l'industrie pharmaceutique. Dans les deux cas, il est peu probable qu'il le fasse vraiment maintenant et ses déclarations sont avant tout destinées à tenter d'éteindre le scandale qui pourrait l'atteindre.

Jacques Servier, patron des laboratoires qui portent son nom, a été décoré par des dirigeants politiques de gauche comme de droite-: Mitterrand en 1985, Strauss-Kahn en 1992, Chirac en 2002, Sarkozy en 2008. Il était ainsi récompensé pour le succès de ses laboratoires-! Aujourd'hui, le rapport de l'IGAS montre qu'il s'agit d'un industriel peu scrupuleux, ayant commercialisé un médicament nuisible qui serait responsable de 500 à 2 000 morts. Et il aura fallu toutes ces victimes pour faire éclater le scandale de la soumission des sommets de l'État aux intérêts d'un capitaliste comme Servier !

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