Hongrie - Les boues rouges polluent toute une région : Capitalistes donc irresponsables13/10/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/10/une-2202.gif.445x577_q85_box-0%2C9%2C172%2C231_crop_detail.png

Dans le monde

Hongrie - Les boues rouges polluent toute une région : Capitalistes donc irresponsables

Au moins huit morts, plus de cent cinquante blessés, certains grièvement : la Hongrie est frappée par une catastrophe provenant d'une usine de traitement de la bauxite, minerai destiné à la fabrication de l'aluminium. La rupture d'une digue d'un bassin de décantation a libéré sur les villages environnants une coulée de boue rouge dévastatrice pour les hommes, les habitations, les eaux, la nature.

On ne sait pas exactement ce que contiennent ces 600 000 à 700 000 mètres cubes de résidus miniers qui se sont déversés, mais ils renferment des métaux lourds tels que le plomb et l'arsenic, les boues sont légèrement radioactives et très chargées en soude caustique, elles ont un effet dévastateur sur la peau. Plusieurs victimes hospitalisées sont ainsi sévèrement brûlées. Les spécialistes surveillent attentivement les rivières et la nappe phréatique, car une grave pollution des sols et des eaux est toujours possible.

Comme d'habitude en pareil cas, les propriétaires de l'usine ont commencé par nier leur responsabilité. Ils ont déclaré respecter les normes et cherché à minimiser la toxicité du produit. Dans les condoléances envoyées aux familles des victimes, ils ont évoqué une catastrophe prétendument « naturelle » et annoncé une aide de... 360 euros par famille. Cela a d'autant plus choqué que cette société MAL (Magyar Aluminium), issue en 1995 du démantèlement de la société d'État, avait été fondée, comme le dit son site Internet, par « des personnes privées hongroises », autrement dit les heureux bénéficiaires de la privatisation. Les mêmes profitèrent ensuite de la privatisation d'usines analogues en Slovénie puis en Bosnie.

Le principal propriétaire de MAL, Lajos Tolnay, a une fortune personnelle qui le place au 21e rang de Hongrie. Son enrichissement a été facilité par les relations qu'il a entretenues, il y a une vingtaine d'années, avec Ferenc Gyurcsany, un ancien responsable des Jeunesses Communistes qui s'était parfaitement adapté à la nouvelle donne. En 1992, Gyurcsany avait monté une société immobilière, Altus, spécialisée dans la reprise d'entreprises en faillite. Par la suite, entre 2004 et 2009, il allait devenir Premier ministre « socialiste », appliquant une politique d'austérité à l'encontre de la population.

Visiblement, Tolnay et les autres propriétaires de MAL sont de la même eau. Selon un député écologiste hongrois, l'entreprise d'aluminium avait été achetée il y a quinze ans à l'État « pour une bouchée de pain (...) au motif qu'il fallait investir 11 millions d'euros pour la sécurité et l'environnement. Mais la plupart de ces investissements n'ont jamais été réalisés. »

Le gouvernement a décidé de placer en garde à vue le directeur général, fils du propriétaire, et de placer l'entreprise sous le contrôle de l'État. C'est le gouvernement, et non l'entreprise, qui fait construire une nouvelle digue, coupant le village dévasté en deux, pour anticiper sur une possible nouvelle coulée de boue.

Il semble que, depuis les privatisations de toutes ces entreprises, le gouvernement ait été très peu regardant quant aux conditions d'exploitation et au respect de l'environnement. Des photos aériennes ont montré que les fuites existaient depuis plusieurs mois, et donc que les contrôles gouvernementaux vis-à-vis des nouveaux propriétaires d'usines ont dû être pour le moins laxistes. La population hongroise et des pays environnants n'a sans doute pas fini d'en payer le prix.

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