États-Unis - Réforme du système financier : Pas de quoi effrayer banquiers et spéculateurs28/07/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/07/une2191.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis - Réforme du système financier : Pas de quoi effrayer banquiers et spéculateurs

Obama se félicite de ce que le Congrès a adopté une loi destinée à réglementer les activités financières de Wall Street afin de « protéger les consommateurs », de contrôler les risques pour « empêcher qu'une crise financière comme celle que l'on connaît puisse jamais se reproduire ».

Mais si la loi adoptée par les deux chambres du Congrès comporte plus de 2 300 pages, elle ne contient rien qui ait de quoi effrayer les banques et autres hedge fonds.

La Réserve fédérale, la FED, la banque centrale américaine, pourra toujours injecter des milliards pour sauver telle ou telle institution financière dite « trop grande pour faire faillite »... à condition que le programme de sauvetage ne soit pas discriminatoire et s'applique aussi à d'autres

Les banques devraient se séparer de leurs activités spéculatives les plus risquées sur des titres pourris en les confiant à des filiales. Mais elles pourront continuer à spéculer sur tout le reste, les taux de change bien sûr, mais aussi tous les produits sophistiqués de la finance du moment qu'ils ne sont pas basés sur des titres pourris comme les subprimes. C'est dire que l'activité spéculative des banques, qui leur rapporte gros, est bien loin d'être bridée. D'ailleurs l'un des parlementaires de New York a déclaré pour le justifier : « Nous avons voulu nous assurer que nous n'allions pas chasser de New York l'activité sur les produits dérivés ».

Quant à la protection des consommateurs en matière de crédit, de prêt, de carte de crédit, etc., la loi prévoit de créer dans la FED un organisme censé y veiller, mais les décisions de celui-ci pourront être cassées si elles « menacent la solidité ou la stabilité du système financier ». Les mesures de protection des consommateurs qui écorneront les profits des banques et autres organismes de prêts pourront facilement être ainsi annulées.

Au tout dernier moment, juste avant le vote de la Chambre, le nouvel impôt sur les banques qui figurait dans le projet de loi et devait rapporter 19 milliards d'euros a été supprimé.

Bien que cette loi qui prétend contrôler la finance est présentée par Obama comme une des grandes réformes de son mandat, personne ne peut dire si même elle aura le moindre impact car, bien qu'ayant fait l'objet de négociations pendant des mois, elle se contente de tracer quelques grandes lignes générales. Il faudra ensuite rédiger plusieurs centaines de règles et de règlements et cela prendra encore plus de temps. Et il est certain que ce sont les centaines de lobbyistes de Wall Street qui auront le dernier mot.

En tout cas il est sûr, contrairement à ce qu'Obama affirme démagogiquement, que cette loi n'empêchera pas l'argent public d'être pillé par les grandes banques et autres grandes entreprises privées, ni d'enrayer la spéculation ni de prévenir les crises. Aucune loi ne peut le faire. D'ailleurs l'un des auteurs du projet de loi avoue lui-même que, pour savoir si la loi est efficace, il faudra attendre... la prochaine crise !

La prétendue réforme d'Obama ne suscite donc guère d'inquiétude à Wall Street. Dès que le Sénat et la Chambre se sont mis d'accord sur un projet de loi commun, le 25 juin dernier, les actions des banques et des entreprises financières ont bondi de près de 3 %. Et des banques comme Goldman Sachs ou J.P. Morgan Chase, censées être les plus touchées par la loi, ont vu leurs actions monter plus que les autres. À ce sujet, un article publié dans le New York Times conclut avec humour : « Peut-être bien que les investisseurs comptent d'ores et déjà sur ce que les banques savent faire de mieux : trouver le moyen de contourner les nouvelles règles et les restrictions ».

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