Biens mafieux protégés par le système financier26/05/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/05/une2182.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Biens mafieux protégés par le système financier

« Il est inacceptable de voir certains délinquants continuer à jouir financièrement des "produits" de leurs trafics tout en étant incarcérés, ou à mener un train de vie ostentatoire dans leur quartier », a déclaré le député UMP Jean-Luc Warsmann, à l'origine d'un projet de loi qui vise à faciliter la confiscation des avoirs dès le début d'une enquête judiciaire sur un blanchiment d'argent, sans attendre une éventuelle condamnation définitive des présumés truands qui les possèdent.

Véhicules de luxe, bijoux, yachts, immeubles, fonds de commerce, avoirs sur les comptes bancaires ou parts de sociétés seraient ainsi confiés à une « agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués », au lieu de s'évaporer dans la nature ou d'être cédés à des prête-noms, comme c'est souvent le cas aujourd'hui.

Les saisies se sont élevées à 185,7 millions d'euros en 2009, le double de l'année précédente. Sur ce montant, les parts de sociétés ne représentent que trois millions d'euros, cinq fois moins que la valeur des véhicules confisquées, une proportion qui ne correspond pas à la réalité. En effet « les voyous d'envergure ont un faible pour les sociétés à tiroir », constate Le Figaro. Ce journal relevait en août 2007 « des signes inquiétants » de la pénétration en France de la 'Ndrangheta calabraise en France, « féroce, sanguinaire, archaïque par son mode de fonctionnement clanique, mais familière des techniques modernes d'investissement et de communication ».

Avec la crise, « les voyous investissent aussi dans la pierre », constate aujourd'hui le chef d'un office spécialisé du ministère de l'Intérieur, qui pointe tant des immeubles entiers de certaines villes de banlieue que des appartements haussmanniens à Paris ou des manoirs de province.

La nouvelle agence permettra donc peut-être de récupérer le contrôle de certains biens mafieux, comme cela se produit déjà en Italie, où des terrains ou des immeubles confisqués à la Mafia sont ainsi donnés en gestion à des associations d'utilité publique. Mais l'essentiel des biens mafieux n'est pas là : il s'agit de sommes d'argent « sale » mais rapidement blanchi dans les circuits financiers. Or les services de répression spécialisés ne peuvent aller à l'encontre du secret bancaire, où les biens mafieux et les fortunes acquises légalement se mêlent de façon inextricable à la spéculation financière. Les mafias ont donc encore de beaux jours devant elles, tout simplement parce qu'elles font partie intégrante du système capitaliste.

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