Le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de Bourg-en-Bresse, dans l'Ain, a reconnu la « faute inexcusable » de l'entreprise de travaux publics Eurovia, une filiale de Vinci, dans le décès d'un ouvrier en 2008 causé par un cancer de la peau. Outre la satisfaction qu'il apporte à la famille de la victime, ce jugement entrouvre une brèche qui permettra aux travailleurs du bitume de faire reconnaître l'origine professionnelle de leur maladie.

Exposé pendant plus de vingt ans à des émanations de bitume chaud, sans autre protection que des gants, Francisco Andrade avait développé un cancer de la peau qui devait l'emporter. Bien qu'il soit connu que le bitume contient des substances cancérogènes, Eurovia niait toute responsabilité dans la mort de son salarié, prétextant que l'origine du cancer avait été causée par une trop grande exposition au soleil ! C'est sur la base de cet argument qu'elle a d'ailleurs fait appel du jugement.

La FNATH (Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés) salue la décision du tribunal qui, si elle est confirmée, pourra faire jurisprudence et permettrait alors à tous les travailleurs du bitume de faire reconnaître la responsabilité des entreprises qui les ont employés dans une maladie qui peut se déclarer des années, voire des dizaines d'années plus tard. Mais comme dans le cas de l'amiante, la route sera certainement longue avant que les victimes du bitume puissent toucher ne serait-ce qu'un début d'indemnisation.

Il n'en reste pas moins que la décision du TASS de Bourg-en-Bresse est une victoire morale pour la famille Andrade, et elle est aussi un camouflet pour toutes ces entreprises pour qui la santé et la vie des travailleurs passent après les profits.