Haïti : Mépris, indifférence, irrespect, les patrons n'ont que cela à partager avec les travailleurs31/03/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/04/une2174.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Haïti : Mépris, indifférence, irrespect, les patrons n'ont que cela à partager avec les travailleurs

Extrait du numéro 185, du 18 mars 2010, de La Voix des travailleurs, organe de l'Organisation des Travailleurs Révolutionnaires d'Haïti :

Deux semaines après le séisme du 12 janvier, les ouvriers de la zone industrielle ont été invités à reprendre le travail. Les infrastructures de la sous-traitance, notamment les bâtiments, ont été peu touchées. C'est avec un ouf de soulagement que les travailleurs ont accueilli cette nouvelle, compte tenu des milliers de travailleurs qui ont perdu leur djob.

Au moment où tout le monde parlait de solidarité, les ouvriers s'attendaient à une modification des comportements des patrons et de leurs sous-fifres dans les usines, mais c'était mal les connaître. Les patrons ne se sont pas dépêchés d'ouvrir leurs usines par solidarité avec les travailleurs, ils voulaient tout simplement reprendre leurs activités lucratives, remettre en marche le système d'exploitation dans les usines, celui à travers lequel ils volent la force de travail des ouvriers pour s'enrichir. (...)

Dans certains endroits, aucune mention n'a été faite du séisme. L'enfer des cadences, les remontrances des petits chefs ont repris comme avant. Pas un mot de réconfort à l'endroit des travailleurs et de leurs familles qui ont payé le plus lourd tribu dans cette catastrophe. Au contraire, comme on presse du citron, les travailleurs ont été mis sous pression pour rattraper les deux semaines perdues.

Le bruit court que de nombreux patrons ont reçu de l'aide pour voler au secours des travailleurs. Mais si, çà et là, il y a eu quelques distributions d'un plat de mauvaise qualité aux travailleurs, dans l'ensemble les patrons n'ont manifesté aucune solidarité avec ces derniers.

Dans leur grande majorité, tous les travailleurs logent - sont parqués - dans les « camps de la honte » sans eau, sans électricité, sans toilettes, sans nourriture, dans une promiscuité extrême, parfois sans une tente ou un morceau de bâche pour se parer de la pluie. Dans certains endroits, ils sont menacés d'être expulsés par les propriétaires des terrains sur lesquels ils se sont installés ; parfois c'est sur du marécage qu'ils ont mis les quelques effets qu'ils sont arrivés à conserver.

Avec les énormes moyens dont ils disposent, les patrons pourraient s'organiser pour venir en aide à leurs ouvriers respectifs. Ils pourraient chercher un terrain approprié pour les héberger, dans des abris provisoires certes, mais qui offriraient un minimum d'hygiène, de sécurité et un minimum de dignité. Ce serait manifester un peu de solidarité à l'endroit de tous ces travailleurs qui sont saignés chaque jour pour remplir les comptes en banque des patrons. Certains d'entre eux ont fait ce geste, comme celui de la Sogebank ; cela prouve qu'il est possible. Ce sont eux qui ont tous les moyens de production dans ce pays : terres, machines, capitaux, etc. Après une catastrophe de l'ampleur de celle du 12 janvier, ces moyens devraient être mobilisés pour venir en aide d'urgence à la population. Aux grands maux, les grands remèdes, dit-on.

Dans certaines usines, au contraire, les patrons mettent les travailleurs en compétition de production pour avoir une tente. Dans d'autres, chaque fin de semaine, on fait un tirage au sort pour distribuer une tente ou quelques kits alimentaires. Le mépris, l'indifférence, l'exploitation : les patrons n'ont pas oublié leur métier, même en période de catastrophe nationale.

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