Allemagne : Des grandes villes menacées de banqueroute12/02/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/02/une2167.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Allemagne : Des grandes villes menacées de banqueroute

Petra Roth, présidente de la Fédération allemande des communes et politicienne conservatrice influente, a annoncé le 2 février que l'ensemble des communes de la République fédérale subissait une situation financière catastrophique, avec un déficit cumulé de 12 milliards d'euros cette année, le plus élevé de l'après-guerre. Petra Roth parle même de la probable faillite de certaines villes.

Cela est particulièrement vrai pour les grandes villes ouvrières du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, qui avec 18 millions d'habitants est le plus peuplé d'Allemagne, mais aussi le plus ouvrier, puisque le Land contient le bassin industriel de la Ruhr.

Pour les couches populaires, cette annonce n'a rien d'une nouveauté. Depuis des mois, les communes utilisent le prétexte de l'endettement pour fermer de nombreux services publics, rogner les dépenses voire licencier du personnel. C'est le cas de la ville de Duisburg, qui va supprimer 600 emplois, mais qui a déjà fermé des bibliothèques et un centre culturel. C'est le cas de Wuppertal, qui a baissé de deux degrés la température de l'eau des piscines, fermé jusqu'à nouvel ordre son métro suspendu, et qui ne peut remplacer ses camions de pompiers faute de crédits. Dans certaines villes, l'éclairage public est presque éteint après 22 heures. À Essen, on ferme une piscine, on supprime des emplois municipaux. À Oberhausen, les bus ne roulent plus après 21 heures. Dans d'autres communes, ce sont les tarifs qui sont majorés, notamment ceux de crèches.

Cette situation dramatique fait le bonheur des banquiers, qui touchent rubis sur l'ongle les intérêts de ces 12 milliards. Une ville comme Essen paye chaque année 150 millions d'euros d'intérêts. Comme l'a résumé l'adjoint aux finances de Wuppertal, « la ville est désormais la propriété des banques ».

En fait, ces attaques contre la population sont une façon de faire payer la crise aux travailleurs. Sous prétexte d'aider les entreprises, les gouvernements précédents, social-démocrate (Schröder) ou conservateur (Merkel), quand les deux partis ne gouvernaient pas ensemble, ont réduit les recettes des communes, notamment par la quasi-suppression de la taxe professionnelle. En 2009, cette recette était en baisse de plus de 18 %.

Côté dépenses, ces mêmes gouvernements ont imposé des charges supplémentaires aux communes, comme la gestion des crèches ou le soutien financier aux chômeurs, par l'intermédiaire de l'aide au logement notamment. Depuis un an, le nombre de chômeurs a augmenté considérablement, alourdissant la charge des communes, particulièrement les communes ouvrières.

Mais le cri d'alarme de Petra Roth n'est pas sans arrière-pensée. Il tombe pile au moment où s'ouvrent les prochaines négociations salariales dans la fonction publique. Et, alors que le syndicat des employés Verdi réclame pour les 1,3 million de salariés de l'État fédéral et des communes, qui dépendent de la même convention collective salariale, une hausse de salaire de 5 % pour cette année, cette annonce est destinée à faire croire qu'il serait impossible d'augmenter les salaires.

Reste à savoir si les travailleurs concernés accepteront un nouveau recul de leur pouvoir d'achat. Plusieurs grèves d'avertissement ont déjà eu lieu dans toutes les régions du pays avant la nouvelle séance de négociation sur les salaires prévue le 10 février.

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