Irlande - Nouveau référendum sur le traité de Lisbonne : Ils avaient dit «non», on leur a fait dire «oui»07/10/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/10/une2149.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Irlande - Nouveau référendum sur le traité de Lisbonne : Ils avaient dit «non», on leur a fait dire «oui»

Les dirigeants politiques de l'Europe sont enfin soulagés : en Irlande, le référendum du 2 octobre sur le traité de Lisbonne a obtenu une large majorité de 67 % de oui. C'était le second référendum sur le même sujet, car en juin 2008 le non l'avait emporté. Les dirigeants européens et irlandais n'avaient eu de cesse d'imposer un second référendum - ce qui montre le peu de cas qu'ils font de l'avis de la population, dès lors qu'il n'est pas conforme au leur !

Tout comme l'an dernier, tous les partis représentés au Parlement, qu'ils soient gouvernementaux ou d'opposition, faisaient campagne pour le oui, à l'exception du Sinn Fein. Mais si le résultat s'est inversé, c'est que les enjeux du vote avaient en partie changé, aussi bien pour les politiciens que pour les électeurs.

En 2008, l'électorat des grands partis s'était peu mobilisé. Les politiciens craignaient qu'à la suite de l'adoption du traité, il n'y ait plus de commissaire irlandais à Bruxelles. Les patrons redoutaient une hausse des impôts sur les bénéfices. L'Église catholique feignait de craindre que l'Europe remette en cause l'interdiction de l'avortement en Irlande. L'abstention avait atteint 47 %.

Le camp du non avait aussi mobilisé ceux qui voulaient sanctionner les grands partis et leur politique antiouvrière, menée ensemble ou séparément depuis une quinzaine d'années. Ce vote populaire de protestation, s'ajoutant au vote antieuropéen des nationalistes réactionnaires, avait fait gagner le non.

Cette fois-ci, les milieux dirigeants et conservateurs ont été rassurés par les concessions faites par les dirigeants européens à ce qu'ils ont appelé les « spécificités celtiques », regroupant les intérêts et les préoccupations des milieux d'affaires et des calotins irlandais. En plus de la garantie qu'il y aurait toujours un commissaire irlandais à Bruxelles, le bas taux d'imposition des bénéfices (12,5 %) a été maintenu et l'interdiction de l'avortement existant en Irlande a été officiellement acceptée par l'Union européenne... qui ne l'avait jamais mise en cause. Les principaux partis parlementaires se sont donc engagés plus activement dans la campagne pour le oui, et cela s'est traduit par une participation plus forte, de 59 %.

Cette campagne, soutenue par les syndicats et par le patronat, a martelé que l'Europe était le seul recours contre la crise et le chômage. Ce n'était pas l'heure, expliquaient-ils, de sanctionner le Premier ministre, dont l'impopularité atteignait pourtant 89 % des sondés. Il fallait dire oui à l'Europe, ajoutaient-ils, pour sauvegarder les investissements et l'emploi. Cette campagne a porté ses fruits, le oui progressant de 20 % ou plus dans certains quartiers populaires.

Sarkozy n'a pas manqué de revendiquer ce succès, déclarant que ce vote couronnait « les efforts accomplis lors de la présidence française pour apporter une réponse aux préoccupations qu'avaient exprimées les Irlandais ». Oui, Sarkozy et les autres dirigeants européens ont répondu aux préoccupations des patrons, de la hiérarchie catholique et de la fraction de l'électorat réactionnaire qui avait voté non en 2008, tandis qu'une partie des classes populaires a pu voir en l'Europe une protection contre les conséquences de la crise. Mais, en Irlande pas plus qu'ailleurs, ce n'est pas cette Europe des bourgeois qui garantira aux classes populaires les emplois et les salaires corrects auxquelles elles aspirent légitimement.

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