Retrait des troupes françaises d'Afghanistan et de tous les pays qu'elles occupent05/08/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/08/une2140.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Retrait des troupes françaises d'Afghanistan et de tous les pays qu'elles occupent

L'information est passée presque inaperçue pendant la grande transhumance du week-end, où se sont croisés dans les bouchons les vacanciers de juillet et ceux d'août : un jeune caporal de 22 ans est mort dans une embuscade en Afghanistan. Un week-end meurtrier qui a fait huit autres tués parmi les militaires des armées d'occupation occidentales, en même temps qu'une douzaine de policiers afghans.

Du côté de la France, c'est le 29e soldat tué dans un pays où ils n'ont rien à faire, si ce n'est défendre la prétention de la France à jouer à la puissance impérialiste dans cette région.

« Nous devons bâtir la paix avec les Afghans » a déclaré Kouchner pour justifier la présence de l'armée française et de ses 2 900 soldats dans ce pays, auxquels il faut ajouter 800 de plus dans les pays voisins.

« Bâtir la paix » ? Mais la coalition militaire occidentale sous la direction des États-Unis est présente dans le pays depuis près de huit ans ! Et avec quel résultat ? C'est au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 que les États-Unis avaient décidé d'intervenir pour renverser le régime des talibans en Afghanistan, entraînant leurs alliés de l'Otan.

Le régime des talibans, ces étudiants en religion constitués en milices armées, était un régime infâme, avec ses pratiques obscurantistes, sa dictature sur toute la société et, en particulier, sur les femmes.

En renversant le pouvoir des talibans, les États-Unis avaient promis la démocratie et la modernisation du pays. Huit ans après, il n'y a pas plus de démocratie que de modernisation, mais seulement l'état de guerre permanente. Le régime baptisé démocratie, c'est le pouvoir des seigneurs de guerre dans les régions, un gouvernement corrompu jusqu'à la moelle dans la capitale et un président de la République marionnette des puissances occidentales. Quant à la modernisation, elle se limite aux tours de bureaux à Kaboul pour les missions étrangères et les affairistes, entraînant l'envolée de la spéculation immobilière. Pour le reste, rien de changé, ni les structures sociales moyenâgeuses, ni l'oppression des femmes.

La population afghane a payé un lourd tribut à la guerre menée par les troupes occidentales, qui se chiffre à plusieurs dizaines de milliers de morts. Et ses conditions d'existence ne se sont pas améliorées.

Ce pays est depuis longtemps un des plus pauvres d'Asie. Il a payé pour les guerres menées sur son sol par la Grande-Bretagne qui tenta de le coloniser à plusieurs reprises puis, plus récemment, par l'URSS et maintenant par les États-Unis et leurs acolytes.

Une armée d'occupation étrangère n'est jamais bien vue dans quelque pays que ce soit, mais à plus forte raison si cette occupation, au lieu d'améliorer un tant soit peu les choses pour la population autochtone, les aggrave au contraire. La misère et la haine de l'occupation se conjuguent pour permettre aux talibans, chassés du pouvoir il y a huit ans, de trouver des appuis dans la population et de se renforcer. Ils contrôlent aujourd'hui plus de la moitié du pays et mènent des opérations militaires jusqu'aux abords de la capitale.

Les armées occidentales « ne bâtissent pas la paix », contrairement à ce que prétend Kouchner. Elles poussent la population dans les bras des talibans. Incapables de les éradiquer, les dirigeants occidentaux envisagent de plus en plus ouvertement de s'entendre avec les talibans. La boucle sera alors bouclée : après avoir consacré des sommes faramineuses à une guerre qui s'enlise, les puissances occidentales finiront par s'entendre avec ceux qui leur ont servi de prétexte pour intervenir. Mais, entre-temps, leurs armées auront semé dans le pays encore plus de morts et de destructions.

La carrière militaire du jeune caporal mort sur le sol afghan a beau avoir été courte, en le conduisant en Côte-d'Ivoire puis au Kosovo, elle illustre la présence militaire de l'impérialisme français sur plusieurs « théâtres d'opérations ». De la Côte-d'Ivoire au Tchad en passant par la République Centrafricaine, des hommes sous uniforme français continuent à tuer, et à l'occasion à se faire tuer. Pour la paix ou pour la démocratie, nous dit-on. Mais, en réalité, ils tuent et ils meurent pour défendre les intérêts économiques et les prérogatives diplomatiques du grand capital.

Éditorial des bulletins d'entreprise du 3 août

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