Toulouse - Procès AZF : Un réquisitoire impitoyable... pour des peines dérisoires03/07/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/07/une2135.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Toulouse - Procès AZF : Un réquisitoire impitoyable... pour des peines dérisoires

Après quatre mois d'audience, les deux procureurs du procès de l'explosion d'AZF ont fait leur réquisitoire. Dans un raisonnement implacable, l'erreur qui a conduit à la catastrophe a été identifiée. Puis les responsabilités de l'industriel dans les causes de cette erreur ont été établies. Ensuite les manoeuvres de l'industriel pour dissimuler la vérité ont été dénoncées. Les fautes de l'industriel ont été identifiées, analysées. Et enfin ces fautes ont été qualifiées pénalement.

Les sanctions maximum ont alors été demandées... et ce fut la douche froide. 225 000 euros d'amende ont été requis contre la société Grande Paroisse, gestionnaire du site de l'usine AZF, et enfin trois ans de prison avec sursis et 45 000 euros d'amende ont été requis contre Serge Biechlin, le directeur de l'usine au moment de l'explosion qui, rappelons-le, a fait 31 morts, des milliers de blessés et des dizaines de milliers de sinistrés le 21 septembre 2001.

Par ailleurs, rien n'a été requis contre le groupe Total dont faisait partie l'usine et Thierry Desmarest, son PDG de l'époque.

Ainsi, selon les deux procureurs, la loi ne permet pas de rechercher les responsabilités des vrais responsables, de ceux qui à la tête d'un groupe imposent leur politique, des restrictions incessantes sur la sécurité.

En ce qui concerne les personnes physiques, ces deux procureurs qui représentent la loi affirment que celle-ci ne permet de condamner que des exécutants, et à des peines non dissuasives.

Pour ce qui concerne les sociétés, seule une coquille vide, Grande Paroisse, encourt une peine avec cette amende de 225 000 euros. Avec ses bénéfices déclarés pour l'année 2008 qui se montent à 14 milliards d'euros, le groupe Total pourrait payer 62 000 amendes de ce montant ! Pour mémoire, le groupe Total a payé 150 millions d'euros pour que la SNPE (entreprise voisine d'AZF) accepte de retirer sa constitution de partie civile, 150 millions d'euros pour acheter son silence.

Alors évidemment, du côté des sinistrés, les sentiments sont mitigés. Ils sont contents que la faute de l'industriel soit clairement dénoncée, mais ils comprennent aussi que des peines aussi dérisoires sont quasiment un encouragement à continuer.

Le tribunal voulait que ce jugement soit pédagogique. Eh bien, il l'a été. Parce que quelques voix discordantes ont réussi à perturber le déroulement prévu. Parce que des sinistrés ont fait citer Thierry Desmarest et le groupe Total, et qu'ainsi la question de leur responsabilité a pu être posée publiquement. Parce que quelques ouvriers, AZF et sous-traitants, ont osé raconter la réalité de l'exploitation quotidienne, renvoyant à leur juste place tous les mensonges du directeur et de ses soutiens.

L'avocat de Total a plaidé pour améliorer l'image de Total, et il a scandalisé bien des victimes en affirmant que Total était « une société au service de la nation ». Un service à 14 milliards et... une explosion !

Ce procès a été effectivement pédagogique aussi parce qu'il a montré que la loi ne prévoit pas de punir les responsables d'une telle catastrophe. Total n'a pas besoin de se placer hors la loi, non, c'est la loi qui a choisi de regarder à côté. Il faudra autre chose qu'un procès pour mettre hors d'état de nuire ces groupes au-dessus des lois qui imposent leur dictature sur la société.

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