Qui paye les dettes des autres s'appauvrit...03/07/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/07/une2135.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Qui paye les dettes des autres s'appauvrit...

Les ministres ne rechignent pas devant le travail du dimanche : ils ont été tous réunis pour discuter du grand emprunt proposé par Sarkozy. On ne sait pas quel sera le montant de l'emprunt, ni ses modalités, ni à quoi la somme récoltée est censée servir. Sarkozy a parlé de la nécessité de combler les « retards d'investissements ». En clair, donner à l'État les moyens d'aider les patrons à procéder à des investissements auxquels ces messieurs refusent de procéder, car pas assez rentables ou pas tout de suite.

Les milliards accordés aux banquiers dès le déclenchement de la crise financière, puis aux grands patrons de l'industrie, notamment ceux de l'automobile, ont vidé les caisses de l'État. L'emprunt vise à trouver l'argent dont l'État ne dispose pas, mais en aggravant encore plus son endettement.

Bon an mal an, l'État emprunte au système financier de quoi boucler son budget. Une partie croissante sert à payer les intérêts et le remboursement des emprunts passés. Car, s'il n'y a pas d'argent pour compenser le déficit de la Sécurité sociale ou pour financer le développement des services publics à la hauteur des besoins, il y en a toujours pour subventionner le grand patronat ! Ces emprunts et leurs intérêts cumulés ont abouti à une dette publique faramineuse. Elle représente tout simplement une partie de ce que la classe capitaliste coûte au budget de l'État.

La seule différence entre l'emprunt Sarkozy et ceux qui sont faits habituellement, c'est qu'il est contracté non pas auprès du système financier, mais auprès de ce que les commentateurs appellent le « public ». Mais qui est ce « public » ?

Ce ne sont certainement pas les chômeurs, les retraités, ni la grande majorité des salariés, qui ont du mal à boucler les fins de mois, qui pourraient prêter à l'État les économies qu'ils n'ont pas !

Le « public » qui a le pouvoir de prêter à l'État se recrute pour l'essentiel dans la bourgeoisie petite et grande, à qui l'État garantira un taux d'intérêt rentable, la sécurité de placement de son argent et, peut-être, quelques menus avantages comme l'indexation sur l'évolution des prix.

Quelle que soit la destination de l'argent ramassé par l'État avec cet emprunt, c'est l'emprunt lui-même qui représente déjà un cadeau pour la bourgeoisie. Il assure aux souscripteurs une rentrée financière régulière, plus sûre en cette période de crise que l'investissement dans la production. Un cadeau considérable que la bourgeoisie appréciera à sa juste valeur, comme elle a apprécié les grands emprunts précédents lancés, chacun en leur temps, par Pinay, Giscard, Barre ou Balladur. C'est ainsi par exemple que l'emprunt Giscard, qui a permis à l'État de récolter 6,5 milliards de francs, aura coûté au final, avec les intérêts et l'indexation sur l'or, 76 milliards de francs ! Plus de dix fois plus cher pour l'État... et un gain en conséquence pour les prêteurs !

Et qui paiera le remboursement de l'emprunt Sarkozy ? Tout le monde, c'est-à-dire essentiellement les classes populaires, celles à qui cet emprunt n'aura rien rapporté. Elles le paieront par une augmentation de leurs impôts - et il faut rappeler que le gros des impôts est constitué par ceux sur la consommation qui sont payés y compris par les non-imposables. Mais elles le paieront aussi par la dégradation continue des services publics, sur lesquels on fera des économies pour pouvoir payer les intérêts de la dette.

« Ne demande pas pour qui sonne le glas, il sonne pour toi ». Dans cette société dominée par la bourgeoisie et gouvernée par des hommes à son service, les initiatives gouvernementales visent toutes à dépouiller un peu plus les classes populaires, pour permettre aux plus riches d'être encore plus riches.

Il est cependant arrivé au moins une fois dans l'histoire que les classes laborieuses refusent d'honorer les dettes contractées en leur nom par leur classe dirigeante. Il s'agissait du fameux emprunt russe dont le non-remboursement a assombri les jours de plusieurs générations de bourgeois grands et petits. « Pas de raison que les exploités payent pour les dettes de leurs exploiteurs ». Le gouvernement issu de la révolution ouvrière de 1917 en Russie avait su régler le problème de la dette publique de façon radicale.

Éditorial des bulletins d'entreprise du lundi 29 juin

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