Fin des reclassements « indécents »... Mais pas des licenciements03/07/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/07/une2135.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Fin des reclassements « indécents »... Mais pas des licenciements

Le Parlement a adopté mardi 30 juin un texte présenté par un député du Nouveau Centre, qui empêchera les entreprises de proposer à leurs salariés, dans le cadre d'un plan social, des reclassements indécents dans d'autres pays. Cette proposition répondait à l'émotion soulevée par des propositions du genre de celle du patron de Carreman, entreprise textile de Castres, qui avait proposé en mai 2009 à neuf salariés licenciés d'aller travailler en Inde six jours par semaine pour 69 euros brut par mois... Ce patron n'avait d'ailleurs pas été le seul, d'autres ayant proposé des postes en Pologne pour 700 euros brut par mois, en Roumanie pour 110 euros brut ou en Inde pour 160 à 320 euros par mois.

Au passage, cela souligne de quelle façon scandaleuse sont rémunérés des dizaines de millions de travailleurs dans les pays pauvres. Mais en l'occurrence, le patron de Carreman avait eu le cynisme d'expliquer que la loi l'obligeait à faire trois propositions de reclassement dans l'entreprise ou dans une entreprise du groupe, y compris à l'étranger. Mais, la loi ne précisant pas les conditions de rémunération, il ne s'était pas privé de proposer des salaires de misère.

Désormais le patron devra proposer une « rémunération équivalente » en « valeur absolue » à l'emploi précédent, et les salariés disposeront d'un délai de six jours pour dire s'ils acceptent un reclassement à l'étranger et à quel salaire.

On pourrait se féliciter de l'interdiction de ces propositions indécentes, qui étaient bien évidemment inacceptables par les salariés et dont le seul but était de permettre leur licenciement après qu'ils les ont refusées. Mais sur le fond cela ne changera rien : les licenciements seront toujours possibles après le refus de ces propositions de reclassement. Et même si les patrons ne pourront plus proposer des salaires de misère en Inde ou en Pologne, on peut compter sur eux pour faire des propositions peut-être moins indécentes mais tout aussi inacceptables. C'est ce qui s'est produit avec les travailleurs de l'équipementier automobile Lear dans l'Oise, à qui on a proposé d'aller travailler non pas en Inde mais à Cergy, à près de 70 km, avec des salaires diminués ; cela a déclenché une grève de onze semaines qui a obligé la direction à proposer des conditions plus acceptables.

Cette loi qui a été proposée par un député du Nouveau Centre n'a soulevé aucune critique du Medef, pourtant si prompt à pointer du doigt les lois qui étrangleraient le patronat, celui-ci n'est visiblement pas effrayé par les nouvelles dispositions. Alors, contre les licenciements qui se multiplient, la seule proposition décente serait de les interdire !

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