Israël-Europe : Un ministre d'extrême droite en tournée06/05/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/05/une2127.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Israël-Europe : Un ministre d'extrême droite en tournée

Reçu à bras ouverts par Berlusconi, avec un peu plus de réserve en France, le nouveau ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Liberman, devait poursuivre sa tournée européenne par Prague et par Berlin, précédé par une réputation bien établie de politicien d'extrême droite.

En janvier, alors que tous les hommes politiques israéliens, en campagne électorale législative et pour la constitution du futur gouvernement, rivalisaient à qui apparaîtrait partisan de la manière la plus brutale contre les aspirations des Palestiniens, en particulier à Gaza, Liberman les a tous surpassés. Il avait alors préconisé de « combattre le Hamas (en fait, les Gazaouis) exactement comme les États-Unis avaient procédé avec les Japonais durant la Seconde Guerre mondiale (afin) qu'occuper le pays ne soit pas nécessaire ». Nul besoin d'être féru d'histoire militaire pour comprendre que Liberman suggérait de faire à Gaza ce que les Américains avaient fait à Hiroshima et Nagasaki.

Cela en dit long sur l'absence de scrupules du personnage vis-à-vis des populations palestiniennes. C'est un parti pris sanglant qui suffirait aussi à disqualifier ce qui est l'axe diplomatique de la tournée de ce monsieur. Car lui comme le gouvernement auquel il appartient assurent à qui veut bien les entendre que le danger principal au Proche-Orient... serait que l'Iran se dote d'une arme nucléaire, alors que certains dirigeants d'Israël, on le voit, ne font pas mystère d'être prêts à s'en servir !

Certes, ce n'est pas vraiment nouveau. Mais jusqu'à présent les dirigeants israéliens ne le disaient pas aussi crûment. De même, quand Liberman parle de priver du droit de vote les citoyens d'Israël qui ne feraient pas allégeance à cet État en reconnaissant son « caractère juif intangible » - ce qui, par définition, ne vise que les Arabes israéliens - il se place dans la logique du sionisme. Mais il la pousse vers ses conclusions ultimes : la constitution d'un État qui se voudrait « ethniquement pur » ! Et quand il parle d'expulser du pays les Arabes israéliens, sa démarche est la même. Il joue ainsi sur les craintes de certains secteurs de la population israélienne de voir le dynamisme démographique des Palestiniens faire qu'à terme ceux-ci puissent devenir numériquement majoritaires en Israël. C'est même son fonds de commerce depuis qu'il a créé un petit parti xénophobe anti-arabe, Israël Beiteinou. Mais il dit tout haut ce que pensent tout bas, sans encore oser le dire ouvertement, de nombreux politiciens du pays, qu'ils soient de droite, du centre, voire travaillistes.

C'est même cela qui, aujourd'hui, gêne non seulement un peu un Sarkozy, qui en a pourtant vu d'autres, mais même les dirigeants américains, ces protecteurs traditionnels inconditionnels de l'État israélien.

Ces dernières semaines, Obama et son administration se sont ainsi plusieurs fois publiquement démarqués des déclarations de membres du gouvernement de Netanyahou, notamment quand lui et ses ministres donnaient à entendre que, pour eux, la création d'un État palestinien était écartée.

Obama a-t-il l'intention de faire véritablement pression sur les dirigeants israéliens pour leur faire accepter la constitution d'un État palestinien ? En tout cas, les dirigeants des États-Unis préféreraient qu'ils continuent au moins à se prêter au jeu diplomatique consistant à faire semblant d'y être prêts... un jour.

Certes, de résolution de l'ONU en résolution de l'ONU, de conférence tenue sous l'égide des États-Unis en vagues promesses à un peuple privé d'État depuis plus de soixante ans, la perspective de la création d'un tel État avait tout du mirage. Mais, tant que les dirigeants israéliens faisaient semblant de l'accepter, cela facilitait les relations des puissances occidentales avec les États arabes de la région. Alors, il est possible que les dirigeants américains et européens tentent d'obtenir des dirigeants israéliens qu'ils s'inscrivent à nouveau dans ce jeu, sans pour autant faire le nécessaire pour sortir le conflit de l'impasse. Or c'est justement cette impasse qui a fait le lit d'un Liberman, donnant un poids accru aux positions de l'extrême droite dans la population israélienne.

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