Pirates en mer Rouge et dans l'océan Indien : L'impérialisme a semé le vent24/04/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/04/une2125.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Pirates en mer Rouge et dans l'océan Indien : L'impérialisme a semé le vent

Depuis quelques mois, et particulièrement depuis le retour du beau temps, les attaques contre des navires se sont multipliées en mer Rouge. Les pirates, partant des côtes de Somalie, mettent à la mer de petites embarcations et attaquent désormais quotidiennement de grands navires de commerce à plusieurs centaines de kilomètres des côtes.

Malgré la présence de bâtiments de guerre venus de tous les grands pays capitalistes pour protéger le millier de bateaux qui croisent annuellement dans les parages, une vingtaine de navires et plusieurs centaines de marins sont actuellement retenus dans les eaux somaliennes et attendent le versement d'une rançon. Plusieurs attaques ont été déjouées, certains bateaux ont été libérés, au prix de la vie de plusieurs dizaines de pirates et d'au moins un otage, mais de l'aveu même du secrétaire américain à la Défense « aussi longtemps qu'existe (en Somalie) cet immense nombre de gens pauvres, il est impossible de maîtriser la piraterie ».

En effet, si les commanditaires des actes de piraterie sont des chefs de bande possédant armes, embarcations et réseaux pour négocier les rançons, ceux qui montent à l'abordage sont de très jeunes gens qui n'ont trouvé que cela pour vivre. La Somalie ne leur offre guère d'autres possibilités. Rester à terre, c'est être soit la proie d'une des multiples bandes armées qui tiennent le pays, soit membre de l'une d'elles. Pour quitter le pays, la seule issue est de se confier aux passeurs qui traversent la mer Rouge et jettent souvent à la mer leurs passagers dès que les garde-côtes yéménites s'approchent.

Mais ce que le secrétaire américain appelle « pauvreté », et qui est une misère féroce, ne tombe pas du ciel. La région, qui compte huit millions d'habitants, fut une colonie partagée entre la Grande-Bretagne et l'Italie jusqu'en 1960. Elle connut ensuite une succession de dictatures, des guerres sans fin, des coups d'État, des famines, des déplacements de populations, le départ des paysans vers les bidonvilles. L'ONU et les organisations humanitaires sont alors intervenues à plusieurs reprises et Kouchner s'est fait filmer avec un sac de riz sur l'épaule débarquant sur une plage de Somalie. Mais les puissances occidentales, États-Unis en tête, ont surtout envoyé des troupes, semé un peu plus la misère et la mort, armé des seigneurs de guerre et des milices ethniques.

Puis, en 1995, devant le désastre complet engendré par la présence occidentale, la Somalie a été, selon les mots du ministère français des Affaires étrangères, « laissée à elle-même », c'est-à-dire aux gangsters. Après tout, la Somalie ne possède aucune ressource naturelle et son intérêt stratégique est devenu nul depuis qu'elle ne peut plus servir à menacer l'Éthiopie et que les grands navires modernes passent très au large de ses côtes. La communauté internationale des puissants croyait donc pouvoir laisser sans risque ce territoire devenir un enfer pour ses habitants.

Sauf que les pirates, après s'être exercés sur les petits cargos transportant les vivres destinés aux populations locales, ont trouvé les moyens et les troupes pour franchir la mer et attaquer les porte-conteneurs et les pétroliers des grandes compagnies maritimes. Un tout petit peu de la violence semée par l'impérialisme s'est retournée contre lui en perturbant son commerce. Car c'est uniquement cela qui gêne les Occidentaux, pas le fait que les équipages risquent leur vie.

Les grands ont donc envoyé des navires de surveillance, ce qui ne résout rien, comme on le voit aujourd'hui. Les assureurs ont augmenté leurs tarifs pour les bateaux croisant dans ces parages. Les marchands d'armes français ont mis à l'étude une frégate spécialement conçue pour la lutte contre la piraterie. Tout va donc continuer, à moins que les États-Unis décident de nouveau d'une intervention terrestre et donc qu'après l'Irak et l'Afghanistan ils se lancent dans une troisième guerre. Le remède serait alors pire que le mal.

La crise économique mondiale s'approfondissant et la misère s'accroissant dans bien des pays pauvres, ce type de situation de désespoir risque de se multiplier, car le système économique absurde et criminel qui les engendre est incapable de les résoudre. La racine du mal n'est pas à chercher parmi les jeunes Somaliens transformés en pirates, ni même chez leurs chefs, rançonneurs et criminels. Elle se trouve dans les métropoles impérialistes, au siège des grandes compagnies et au sommet des plus puissants États.

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