Pfizer - Pocé-sur-Cisse (Indre-et-Loire) : Neuf jours de grève qui marqueront25/03/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/03/une2121.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Pfizer - Pocé-sur-Cisse (Indre-et-Loire) : Neuf jours de grève qui marqueront

Pfizer, le n° 1 mondial de l'industrie pharmaceutique est sur la sellette dans l'affaire Reuben, du nom de cet anesthésiste américain que la presse nomme le « Dr Madoff » de la pharmacie. Ce scientifique s'est fait un nom en publiant de nombreuses recherches sur de nouveaux médicaments. On apprend à présent que ces prétendues recherches ont été complètement bidonnées, sans que cela empêche Pfizer et quelques autres d'empocher pendant des années des sommes colossales en commercialisant les pseudo-médicaments que Reuben prétendait avoir testés. En échange de quoi ce dernier, dont Pfizer avait fait l'un de ses porte-parole, a encaissé de substantiels émoluments.

Le moins que l'on puisse dire dans cette affaire où la santé des malades est passée loin derrière l'appât du fric, c'est que Pfizer s'est montré bien peu rigoureux. Bien moins qu'il ne l'a été face aux revendications des travailleurs de son unité de production de Pocé-sur-Cisse, près d'Amboise, qui ont été en grève pendant neuf jours pour l'obtention d'une augmentation de 3 % du salaire de base, plus 60 euros pour les ouvriers et techniciens.

Commencée dans la nuit du 25 au 26 février, la grève a pris fin le soir du 10 mars, sans que la direction eut fait la moindre concession par rapport au 1,9 % d'augmentation qu'elle avait proposé lors des négociations salariales de janvier.

Tout au long, la directrice a opposé aux grévistes un mépris total, conditionnant dès le deuxième jour toute négociation à l'arrêt de la grève (sans même d'ailleurs proposer de payer ces deux jours contrairement à ce que nous avons écrit dans l'article de Lutte Ouvrière du 13 mars). Lorsqu'au neuvième jour de grève, elle consentit enfin à rencontrer les représentants des grévistes, ce fut uniquement pour proposer que les sommes devant être consacrées à l'augmentation de diverses primes soient transférées vers le salaire de base, qui sera ainsi majoré de 2,35 % (au lieu de 1,9 %). Il faut toute la complaisance de la CFDT, qui avait lâché la grève dès le quatrième jour, pour considérer cela comme « une avancée intéressante », puisqu'au bout du compte pas un euro de plus ne rentrera dans les poches.

Déception donc sur le plan des revendications, mais pour autant, parmi les grévistes, l'ambiance n'est pas du tout à l'amertume ni au regret d'avoir mené une grève telle que l'usine Pfizer de Pocé n'en avait pas connu depuis les années 1970 (si l'on excepte une grève d'une nuit et un jour voici dix ans). Ce que retiennent les grévistes et qui fait à juste titre leur fierté, est d'abord d'avoir expérimenté leur force collective, d'avoir appris à convaincre, à entraîner des collègues qui n'étaient pas dans le mouvement au départ. C'est aussi d'avoir tout décidé collectivement, lors des deux assemblées quotidiennes, et de s'être dotés, avec le comité de grève, d'une forme d'organisation qui non seulement a permis la coopération des deux syndicats qui soutenaient la grève (CGT et FO), mais également la mise en oeuvre démocratique des décisions des grévistes.

En deux ans, Pfizer a supprimé à l'échelle mondiale entre 15 et 20 000 emplois. Il vient de racheter son concurrent Wyeth après avoir absorbé Warner-Lambert voilà neuf ans, grâce à quoi cet empire de l'industrie pharmaceutique continue d'engranger des milliards de profits. À l'avidité de ces grands patrons, les travailleurs devront de toute évidence opposer le front de puissantes luttes d'ensemble. À leur niveau, les travailleurs de l'usine de Pocé-sur-Cisse viennent de faire un pas vers la préparation de telles luttes.

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