Grèce : La colère de la jeunesse et celle des travailleurs11/12/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/12/une2106.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grèce : La colère de la jeunesse et celle des travailleurs

Quelques affrontements ont encore eu lieu mercredi 10 décembre à Athènes aux abords du parlement, alors que se déroulaient les manifestations syndicales prévues de longue date pour cette journée de grève générale de protestation contre la politique gouvernementale. Celle-ci intervenait alors que depuis quatre jours une partie de la jeunesse manifestait contre l'assassinat de sang froid d'un jeune de 15 ans, samedi soir 6 décembre, par un policier.

Une partie des jeunes, que la presse appelle les « anti-pouvoir », s'en sont pris violemment aux voitures, aux boutiques, aux banques ou aux supermarchés. Mais de toute évidence la protestation ne se limitait pas à ces groupes et embrassait une large fraction de la jeunesse avec la sympathie d'une bonne partie de la population. L'indignation à l'égard de la police est facilement partagée dans un pays où celle-ci a gardé en grande partie ses traditions des époques de dictature, celle des colonels qui a régné de 1967 à 1974, mais aussi celle des régimes précédents. Mais elle intervient aussi dans un climat de mécontentement à l'égard de la politique gouvernementale, encore aggravé par la crise.

La pauvreté et le chômage s'étendent, en effet, alors que les salaires stagnent et que les prix montent. Le gouvernement de droite de Caramanlis, qui prétend mener une politique de « modernisation » de l'économie marquée par des privatisations de services publics, des coupes dans leur budget ainsi que des attaques contre les retraites, est en même temps discrédité par des scandales à répétition. Comme dans les autres pays européens, ce même gouvernement qui recommande l'austérité à la population n'en a pas moins décidé un plan de sauvetage des banques, pour un montant de 28 milliards d'euros.

On comprend donc l'explosion de colère d'une jeunesse, y compris la jeunesse étudiante, qui ne se voit d'autre avenir que celui de chômeurs ou de travailleurs précaires dans une société en crise. C'est avec raison qu'elle s'en prend au gouvernement et à ses représentants, et sa colère est certainement partagée par une grande partie des travailleurs et des couches populaires. Mais il est certain que les actions violentes, destructrices et gratuites, ne sont pas celles qui peuvent le mieux entraîner celles-ci dans la lutte. Or, au-delà de la protestation contre l'action odieuse de la police, c'est bien le problème posé par toute la situation.

À la veille de la grève du 10 décembre, les organisations syndicales étaient visiblement embarrassées par le climat de tension. Le parti communiste KKE, la formation la plus importante issue du Parti Communiste Grec des années 1950, a pour sa part, tout en s'en prenant au gouvernement, recouru à une explication policière, déclarant que le noyau dirigeant des « anti-pouvoir » suivait un plan préétabli « pour s'en prendre aux travailleurs et déstabiliser la situation politique ». Mais la situation met aussi en accusation l'incapacité des grandes confédérations et des principaux partis de gauche à offrir une perspective de lutte aux travailleurs, aux couches populaires et à la jeunesse, contre les conséquences de la crise et la politique gouvernementale.

Il est vrai que le dirigeant du parti socialiste Pasok, Papandréou, a de son côté appelé à la démission du gouvernement, comptant visiblement sur des élections anticipées. Mais les expériences précédentes du Pasok au gouvernement montrent que les couches populaires n'auraient pas grand-chose à espérer de son éventuel retour au pouvoir. Il faudra que les travailleurs et la jeunesse sachent mettre en avant leurs exigences pour imposer leur droit à la vie, face au cynisme et à la rapacité des dirigeants et des financiers responsables de la crise.

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