Crise financière : Une société à irresponsabilité illimitée27/03/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/03/une2069.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Crise financière : Une société à irresponsabilité illimitée

La crise financière actuelle risque de déboucher sur la crise économique la plus grave depuis la guerre. Cette perspective catastrophique est évoquée par une des têtes pensantes du monde capitaliste, l'ancien président de la banque centrale américaine. Une crise économique grave, cela signifie des milliers d'entreprises fermées ou fonctionnant au ralenti, des licenciements en masse, le chômage, la plongée dans la misère pour une grande partie de la population laborieuse.

Il n'y a aucune catastrophe naturelle à l'origine d'une telle catastrophe économique et sociale. Au contraire. Le jour même où un quotidien annonçait en grand titre cette menace, un autre grand titre soulignait que les plus grandes entreprises cotées en Bourse, celles du fameux CAC 40, avaient réalisé une masse de profits plus importante que jamais. L'économie capitaliste est en train de s'étouffer avec sa propre graisse.

Depuis des années on impose aux travailleurs, au nom de la compétitivité, de plus en plus de travail, avec des effectifs sans cesse diminués et de plus en plus mal payés. Les profits élevés des entreprises viennent de l'aggravation de l'exploitation. La masse croissante de profits n'est pas investie dans la production et dans la création d'emplois, mais dans des opérations financières, dans la spéculation.

C'est la croissance effrénée de la spéculation qui a conduit à l'effondrement du crédit hypothécaire américain puis, de proche en proche, à la crise de tout le système bancaire. Toutes les grandes banques de la planète en voulaient, de ces titres de crédit hypothécaire, tant ils rapportaient gros pendant un temps. Mais aujourd'hui, ils ne valent plus rien. Toutes les grandes banques détiennent de ces titres pourris, au point pour certaines d'être menacées de faillite. Toutes se méfient les unes des autres, toutes se refusent à se prêter mutuellement de l'argent, ce qui fait que le crédit manque alors que de l'argent, il y en a trop.

Rien que cette première phase de l'ébranlement économique se traduit aux États-Unis, son épicentre, par des milliers de licenciements dans le bâtiment et dans le secteur bancaire, sans parler de ces millions de familles modestes chassées de leur logement récemment acheté, car dans l'impossibilité de payer les traites.

Tout le monde sait et tout le monde prédit que le recul de la consommation qui en résultera, conjointement à la difficulté d'obtenir du crédit, entraînera dans la récession d'autres secteurs de l'économie. La crise ne pourra pas rester limitée aux États-Unis.

La catastrophe est donc annoncée. Et à qui les dirigeants du monde capitaliste ont-ils commencé à en faire payer le prix ?

À ceux qui n'y sont pour rien. À ceux sur le dos de qui on a réalisé ces profits dont aujourd'hui l'économie crève.

Pour éviter la faillite en chaîne des banques mouillées jusqu'à l'os dans la spéculation, les banques centrales, c'est-à-dire les États, leur ont déjà distribué des sommes colossales. Elles se proposent de continuer dans cette voie et d'assainir la situation des banques en rachetant leurs titres pourris avec de l'argent public. Alors que les profits sont privés, leur solution consiste à socialiser les pertes.

Même si elles parviennent à enrayer la crise bancaire, ce qui n'est pas dit, cela se traduira par une accélération de l'inflation mondiale. Les hausses de prix minent déjà le pouvoir d'achat des salariés et des retraités. Ecraser le pouvoir d'achat des classes laborieuses, ajouter l'inflation au chômage, pour sauver les profits des banques et des entreprises qui spéculent - en réalité toutes le font -, voilà leur programme économique. Seule une explosion sociale peut les empêcher de l'imposer.

La société crève de cette organisation économique, aussi injuste qu'irrationnelle. Exproprier le grand capital pour mettre fin à la dictature des grands groupes capitalistes, à leur course au profit, voilà le seul programme que les classes laborieuses ont à opposer à celui des maîtres de l'économie.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 25 mars

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