Turquie : Grève sur les chantiers navals21/03/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/03/une2068.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Turquie : Grève sur les chantiers navals

Plusieurs milliers de travailleurs des chantiers navals de Tuzla, situés sur la mer de Marmara, non loin d'Istanbul, se sont mis en grève et ont manifesté les 27 et 28 février derniers.

La petite baie de Tuzla concentre 95 % de la construction navale turque. Sur quelques kilomètres sont implantés 43 chantiers qui fabriquent chimiquiers, pétroliers, et porte-conteneurs de faible tonnage, cargos cimentiers, remorqueurs, navires de pêche et yachts de luxe. La production de ces bâtiments a presque décuplé en quatre ans, propulsant les patrons du secteur de la seizième à la huitième place mondiale.

Cette frénésie d'activité dans la construction navale a un coût pour les 35 000 ouvriers de la baie de Tuzla : depuis août 2007, dix-huit d'entre eux ont trouvé la mort sur les chantiers, en raison des conditions de travail extrêmement dangereuses entraînées par des cadences insoutenables et une exploitation grandissante, les salaires étant pour nombre d'ouvriers extrêmement bas. Depuis 2000, les décès officiellement déclarés se montent à 83, les syndicalistes dénonçant par ailleurs de nombreux décès dissimulés grâce à " l'argent du sang " versé par certains employeurs à des familles ouvrières pauvres et désespérées. Beaucoup subissent de graves blessures ou se retrouvent infirmes à la suite des accidents, une bonne partie d'entre eux ne bénéficiant pas de couverture sociale, car embauchés sans réel contrat par l'une ou l'autre des mille entreprises sous-traitantes qui tirent profit des 200 navires actuellement en commande.

À l'appel du syndicat Limter-Is, membre de la centrale DISK, qui regroupe les travailleurs des ports, des docks, de la construction et de la réparation navales, des milliers de travailleurs ont cessé le travail pour dénoncer leurs conditions de travail et l'insécurité qui ont causé la mort de leurs camarades. Le piquet de grève organisé par des militants aux premières heures du mouvement afin d'appeler les ouvriers à cesser le travail a été brutalement agressé par la police qui a arrêté 75 grévistes et militants syndicaux et s'est livrée, comme souvent, à des passages à tabac. De plusieurs centaines au départ, les grévistes se sont rassemblés jusqu'à se retrouver à plusieurs milliers vers midi. Le syndicat estime à 70 % la participation à la grève. En milieu d'après-midi, les 75 grévistes arrêtés étaient libérés.

Après une nuit de sit-in sur place, des milliers de grévistes se sont à nouveau rassemblés jusqu'à ce que l'association patronale reçoive des représentants du syndicat et recueille les revendications des grévistes, portant sur la limitation à 7,5 heures par jour de la durée du travail, la garantie de paiement par l'employeur donneur d'ordres des cotisations sociales et des salaires, l'hygiène minimum des logements et des vestiaires et le droit à la représentation syndicale. Les demandes ont été déclarées " positives et acceptables " par les représentants des patrons.

Les travailleurs des chantiers, forts de leur démonstration, ne se contenteront certainement pas de les croire sur parole.

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