Challenges veut "réhabiliter" Marx : L'hommage du vice à la vertu ?19/12/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/12/une2055.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Challenges veut "réhabiliter" Marx : L'hommage du vice à la vertu ?

Quel journal expliquait le 6 décembre dernier que le marxisme donne " la meilleure explication du capitalisme d'aujourd'hui " ? Et quelle personnalité dans quel périodique y affirme : " Je serai toujours marxiste " ? Ce n'est ni Arlette Laguiller, ni Lutte Ouvrière. Ce journal, c'est le très pro-capitaliste magazine économique Challenges, et la personnalité, c'est - qui l'eût cru ? - Alain Minc, ex-patron de Saint-Gobain, de Air Industries et grand prêtre du libéralisme et de la déréglementation.

Alain Minc reste bien évidemment un fervent soutien de Sarkozy et n'a pas entamé une reconversion politique. Pascal Lamy, directeur de l'OMC (Organisation mondiale du commerce), pas franchement soupçonnable non plus de dérive bolchevique, affirme lui aussi dans le même magazine : " Personne depuis [Marx] n'a inventé une analyse de la même importance. Même la globalisation n'est qu'une étape du capitalisme de marché telle que Marx l'avait imaginée. " Il semble que certains économistes, à qui Challenges donne la parole, soient inquiets des dérives financières du capitalisme et voient dans les crises, comme celle des subprimes, un signal d'alarme.

Il est incontestable que les travaux de Marx sur le capitalisme fournissent, comme le dit Lamy, encore lui, une parfaite " boîte à outils intellectuelle pour analyser le capitalisme de marché d'aujourd'hui. " Et que Marx avait " prévu ", comme l'écrit dans la même revue un autre économiste, " la montée de l'individualisme, la concentration du capital, la marchandisation du monde, la prolifération de l'industrie financière ". D'où cette remarque savoureuse, dans Challenges toujours, de l'économiste Pierre Rosanvallon, qui appelle la gauche à " redevenir marxiste pour décrypter avec précision les nouveaux modes de production et d'organisation " ! Et en effet, en deux siècles de capitalisme, tous les économistes bourgeois qui se sont succédé ont été bien incapables de donner une analyse du système capitaliste qui soit à la hauteur de celle de Marx, et ceux d'aujourd'hui sont toujours contraints de s'y référer.

Mais ce marxisme que ces économistes veulent " réhabiliter " est évidemment une version " light ", bien débarrassée de ses aspects révolutionnaires. Ils voudraient que Marx n'ait été qu'un chercheur génial, dont les travaux ne serviraient qu'à comprendre l'économie, l'histoire ou la philosophie. Minc affirme même que : " Sans le communisme, il serait considéré comme le penseur absolu. "

Eh bien, ne leur en déplaise, Marx n'était justement pas un savant désireux de laisser son nom dans les manuels d'économie, c'était un révolutionnaire, un militant qui étudiait les rouages du capitalisme afin de fournir des armes à la classe ouvrière pour le renverser.

Et c'est bien cette analyse marxiste du capitalisme, à laquelle ils rendent hommage, qui démontrait la nécessité pour l'humanité de mettre fin à ce système pour aller vers le communisme.

Alors qu'ils se méfient. Tous les lecteurs de Marx ne sont pas des économistes bourgeois, il y a encore beaucoup de gens capables de lire Marx et de reprendre ses conclusions.

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