À la SNCF : L'amertume des cheminots à l'égard des directions syndicales28/11/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/11/une2052.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

À la SNCF : L'amertume des cheminots à l'égard des directions syndicales

À la SNCF, la reprise du travail a commencé à se faire dès le 21 novembre, quand des responsable de la CGT ont martelé que le nombre de grévistes diminuait partout, que les négociations allaient se poursuivre pendant un mois, et que de ce fait les cheminots ne pouvaient pas rester mobilisés tout ce temps, qu'il fallait garder ses forces pour repartir plus tard si la négociation n'aboutissait pas. Bref, ils n'ont pas lésiné sur les arguments pour inciter les cheminots à reprendre le travail.

Mais malgré les appels à " suspendre ", bien des assemblées ont poursuivi la grève, certaines jusqu'au 23. Et le travail n'a vraiment repris que le 24, le 25, voire le 26 novembre.

Dans les dernières assemblées, les cheminots ont exprimé leur déception et leur écoeurement face à la politique des directions syndicales qui se sont moquées des avis exprimés et maintes fois votés en assemblée générale, au travers de motions multiples, demandant le retrait de la réforme contre les régimes spéciaux. Beaucoup de grévistes ont tenu à dire qu'ils ne s'étaient pas mis en grève pour obtenir un calendrier, celui des pompiers leur aurait coûté moins cher.

Parmi les grévistes mécontents, nombreux ont aussi été les militants syndicaux, en particulier ceux de la CGT, qui se sont senti trahis par l'acceptation du fameux calendrier proposé par le gouvernement et la SNCF, et accepté par tous les responsables syndicaux. Avec le calendrier, leurs dirigeants acceptaient que les négociations se fassent dans le cadre imposé par le gouvernement à savoir l'acceptation des 40 annuités, des décotes, de l'indexation des pensions sur les prix et non plus sur les salaires, etc. Et même si des mesures limitant quelque peu l'impact des décotes et du nouveau mode de calcul des pensions peuvent être discutées, celles-ci sanctionneront d'importants reculs qu'auront à subir les cheminots, en particulier les récents embauchés et ceux qui le seront dans l'avenir. Cela, bien des grévistes l'avaient par avance et largement dénoncé. Et parce que les dirigeants syndicaux n'en ont pas tenu compte, des adhérents et militants de la CGT se sentent aujourd'hui trahis.

Dans aucune assemblée, même si la reprise du travail s'est faite avec parfois une courte majorité et en traînant les pieds, les grévistes n'ont trouvé la force d'outrepasser le mur syndical auquel ils se heurtaient. Y avait-il avec cette grève la possibilité de faire vraiment reculer le gouvernement ? La question reste ouverte. Non pas à cause d'un manque de volonté et de combativité des grévistes mais parce que le mouvement n'a pas été au bout de ses possibilités, arrêté dans sa phase encore ascendante, au lendemain même de la manifestation où les grévistes des transports et de l'énergie avaient rejoint ceux de la fonction publique. Ce jour-là, le 20 novembre, les cheminots étaient encore presque partout installés dans la grève et avaient conscience que, tant qu'ils ne reprendraient pas le travail, ils pourraient encore faire reculer le gouvernement.

Tous constataient que Sarkozy, après sa prestation ratée aux ateliers du Landy, où il avait été interpellé par les cheminots, désertait curieusement les médias ; que le patronat commençait à s'inquiéter d'un possible blocage d'une partie de l'économie, que les commerçants des centres villes se plaignaient de plus en plus de la baisse des ventes. Et puis, contrairement à ce que martelaient les médias, les grévistes constataient que leur mouvement n'était pas incompris par l'opinion, malgré les gênes occasionnées. De leur côté, les travailleurs de la RATP tenaient eux aussi le coup et des liens se tissaient même entre grévistes à Paris.

C'est pour toutes ces raisons qu'il existe aujourd'hui une amertume certaine parmi les cheminots, mais pas de démoralisation ni de découragement. Pour beaucoup, il s'agissait de leur première grève et donc de leur première expérience de lutte ; une expérience qui, si elle est suivie d'une prise de conscience de la nécessité pour les grévistes de contrôler leur grève, pourra être positive pour un avenir qui peut être proche.

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