Grande-Bretagne - Northern Rock : De la spéculation à la panique financière19/09/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/09/une2042.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grande-Bretagne - Northern Rock : De la spéculation à la panique financière

Le gouvernement Brown avait nié l'évidence, que ce soit la chute des actions bancaires ou le resserrement du crédit, perceptibles à Londres dès la fin juillet. Selon le ministre des Finances Alistair Darling, l'économie britannique était à l'abri de toute contagion. Fin août, alors que la Banque d'Angleterre venait de lâcher des milliards d'euros aux banques, Darling persistait à dire que la tourmente financière américaine ne traverserait pas l'Atlantique.

Qu'importe pour Darling que la bulle spéculative immobilière anglaise ait été comparable à celle des USA ! Comme si cette bulle, symptôme de la crise qui se développait dans le système bancaire américain, ne pouvait pas être le symptôme d'une crise similaire dans le système bancaire anglais !

Mais le 13 septembre, les queues devant les 72 succursales de Northern Rock, huitième banque britannique et cinquième prêteur immobilier du pays, ont montré le peu de foi que les épargnants attachaient aux propos du gouvernement.

Pourquoi ce mouvement de panique ce jour-là et pourquoi à Northern Rock ? Nul ne sait exactement. Northern Rock ne prêtait pas spécialement aux plus pauvres et son portefeuille de prêts immobiliers n'avait rien de particulièrement " risqué ". En revanche, elle est une sorte de symbole des pires pratiques spéculatives.

Northern Rock était l'une de ces mutuelles immobilières qui ont longtemps financé l'accession à la propriété, et dont la règle d'or était que le total des prêts consentis ne devait pas excéder l'argent confié par les épargnants, frais d'administration et bénéfices étant prélevés sur les intérêts versés par les emprunteurs. Mais la déréglementation changea tout cela, en permettant aux mutuelles de se muer en banques.

En 1996, Northern Rock devint une banque cotée en Bourse, qui eut recours aux nouvelles méthodes spéculatives. Pour financer ses prêts immobiliers, elle se mit à emprunter sur les marchés financiers, au point que ces emprunts correspondent aujourd'hui à 80 % du montant de son portefeuille de prêts. Seulement, ce sont des emprunts à court terme, qu'il faut renouveler constamment en spéculant sur les variations de taux d'intérêt (en d'autres termes, c'est de la " cavalerie "). La moindre hausse des taux d'intérêt réels signifie des pertes considérables, quand on gère ainsi l'équivalent de 180 milliards d'euros comme le faisait Northern Rock !

En fait, ni la panique de Northern Rock, ni le resserrement actuel du crédit ne sont tombés dans un ciel serein. Depuis le début de l'année 2007, malgré les profits colossaux enregistrés par les banques en 2006, toutes ont enregistré des baisses en Bourse. Dans le cas de Northern Rock, cette baisse a été de 25 %. Puis, à partir du début août, ces baisses se sont accélérées. Northern Rock, pour sa part, sera tombé de 18 euros l'action en janvier dernier, à 4,5 euros le 17 septembre.

Face à ce début de panique et aux risques de contagion pour le système bancaire, le gouvernement Brown a fini par réagir. Le 17 au soir, il annonçait que les dépôts de tous les clients de Northern Rock seraient garantis et que le taux d'intérêt consenti aux entreprises en cas d'urgence par la Banque d'Angleterre était réduit, ce qui signifie que ce gouvernement est prêt à faire payer à la population les frais de la spéculation.

Il n'en a pas fallu plus pour assister à un début de remontée des actions en Bourse, mais pour combien de temps ? On a vu comment les hoquets de quelques institutions de crédit américaines ont suffi à affecter le système bancaire aux quatre coins du monde. La population anglaise, la plus endettée du monde, a une dette globale équivalant à 2 100 milliards d'euros, soit 1,3 fois le produit annuel de l'économie anglaise. Que se passera-t-il si la mécanique des marchés financiers s'enraye vraiment ? Pour la population laborieuse, cela signifiera non seulement une baisse importante de son niveau de vie, mais également des fermetures d'entreprises en grand nombre, pour cause d'austérité.

Le système capitaliste malade fait peser au-dessus de la tête des populations cette menace de crises incontrôlées.

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