Sarkozy prétend moraliser le capitalisme : Autant demander du lait à un bouc23/08/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/08/une2038.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Sarkozy prétend moraliser le capitalisme : Autant demander du lait à un bouc

La chute des prix de l'immobilier aux USA a mis à mal toutes les sociétés financières spécialisées dans les prêts à des clients plus ou moins solvables pour construire ou acheter de l'immobilier. Elles ne prenaient aucun risque car les prix montaient en permanence et, si leurs clients ne pouvaient plus payer, elles récupéraient bien plus que leur mise en revendant leurs biens. La catastrophe est arrivée lorsque les prix de l'immobilier ont baissé, les logements n'arrivant plus à se vendre.

Mais cette crise n'a pas touché que les banques spécialisées dans ces prêts à risques. En effet, nombre de grandes banques ou même d'entreprises industrielles ou commerciales des États-Unis mais aussi d'Europe et d'Asie avaient placé des fonds dans ces officines. Elles risquaient d'y perdre beaucoup. Et, dans l'ignorance de quelles sociétés étaient concernées, cela a suffi pour voir depuis un mois les Bourses du monde entier s'affoler.

La crise est passée, nous dit-on, et les actions en Bourse remonteraient. Mais le samedi 18, la Banque d'État allemande a dû encore injecter plus de 17 milliards d'euros dans une banque, la Sachsen LB, pour lui permettre de ne pas fermer ses guichets. Rien ne garantit donc, malgré les discours optimistes de la ministre de l'Économie, que la crise soit vraiment « dernière nous ».

La Bourse s'est peut-être stabilisée, mais à quel prix ?

Dans la semaine du 13 août, la Banque centrale européenne (BCE) a injecté dans les établissements financiers, mis à mal par cette crise, plus de 180 milliards d'euros. Mais ce sont les Banques centrales nationales qui financent la BCE, à raison d'environ 15 % pour la Banque de France. Cela signifie que celle-ci a sorti de ses caisses en quelques jours une trentaine de milliards d'euros (deux fois le déficit qu'on nous dit pourtant « abyssal » de la Sécurité sociale) pour voler au secours de spéculateurs risquant l'argent des autres, de boursicoteurs et de grands groupes capitalistes. Et ce que la Banque de France aura perdu dans cette opération, c'est évidemment la population laborieuse qui en fera les frais, ne serait-ce que par une détérioration supplémentaire des services publics.

Sarkozy, de sa richissime résidence de vacances aux États-Unis, s'est déclaré « pour la moralisation du capitalisme financier », ajoutant qu'il était « pour une économie qui fasse toute sa place aux créateurs et aux salariés, pas aux spéculateurs ». Mais en l'occurrence, les spéculateurs ne sont pas d'obscurs margoulins, mais les plus grandes sociétés du pays, celles que Sarkozy couvre de cadeaux, sous formes d'avantages fiscaux et de diminution des cotisations sociales, et tout cela justement au détriment des « créateurs et des salariés », car ce sont ces derniers les vrais « créateurs » de richesses. Il a réclamé plus de « transparence » dans les marchés financiers. Mais ce qui s'est passé là est la forme normale de fonctionnement du capitalisme. Et si la déclaration de Sarkozy est autre chose que des mots, que va-t-il faire ? Mettre en place une commission, composée d'amis de capitalistes, qui ne fera pas plus que ce que fait l'actuelle Autorité des marchés financiers, qui n'a rien vu venir, et rien su empêcher ?

Car une vraie transparence, c'est ce qu'Arlette Laguiller réclamait lors de la dernière campagne présidentielle, c'est-à-dire l'abolition du secret bancaire et du secret commercial, le contrôle de la population sur la comptabilité des banques, des assurances et des grandes entreprises. C'est aussi le droit pour tous les salariés d'informer l'ensemble des citoyens sur ce qu'ils savent de ce qui se passe dans leur entreprise.

Ce n'est évidemment pas sur Sarkozy qu'il faut compter pour cela, ni sur aucun membre de la majorité ou de l'opposition. Mais cette « transparence »-là, il faudra bien que les travailleurs l'imposent, s'ils ne veulent pas vivre un jour une véritable, cette fois, crise économique catastrophique.

Éditorial des bulletins d'entreprise du 20 août

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