Le président ivoirien Laurent Gbagbo et la multinationale Trafigura viennent de conclure un accord dans l'affaire de la pollution causée en août 2006 à Abidjan par le Probo Koala, cargo affrété par cette compagnie. La multinationale s'engage à verser 152 millions d'euros à l'État ivoirien au titre de l'indemnisation des victimes ainsi que pour la construction d'une usine de traitement des déchets.

Le Probo Koala avait déversé des boues hautement toxiques à l'air libre et en plein coeur d'Abidjan, faisant au moins dix morts et intoxiquant des milliers de personnes, dont plusieurs gravement. Sans parler des effets de cette pollution à moyen terme, du fait de l'infiltration des produits dans le sol et de la contamination des nappes phréatiques.

Cette pollution délibérée n'avait pu se faire sans la complicité des dirigeants de Trafigura avec des sous-traitants sans scrupules, ainsi qu'avec les hautes sphères de l'État ivoirien qui, dans un premier temps, ont fermé les yeux sur ce trafic de déchets.

Aux termes de l'accord conclu, " ni le gouvernement ivoirien ni Trafigura n'acceptent d'endosser la responsabilité pour ces événements " ; autrement dit, les deux parties signataires s'exonèrent de toute poursuite judiciaire. Ce texte implique également la libération immédiate des trois dirigeants de la compagnie qui étaient incarcérés depuis le 18 septembre en Côte-d'Ivoire.

Une fois de plus, les pollueurs s'en tirent à bon compte. Quant à Gbagbo, il peut se réjouir de cet afflux d'argent frais qui viendra alimenter la corruption de son régime et enrichir ses propres comptes. Les victimes, elles, ont bien raison d'être sceptiques : après avoir été intoxiquées, elles risquent d'être spoliées et d'attendre longtemps pour voir la couleur de cette indemnisation.