Les uns dirigent toute l’économie, les autres nous soûlent de paroles29/11/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/12/une2000.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Les uns dirigent toute l’économie, les autres nous soûlent de paroles

La direction de Volkswagen, la plus grande entreprise d'automobiles d'Europe, vient d'annoncer que, sur les 5400 salariés de son usine de Bruxelles, en Belgique, elle n'en gardera que 1500. 3900 travailleurs, et peut-être plus, vont se retrouver au chômage du jour au lendemain.

«Une catastrophe nationale», a affirmé le Premier ministre belge qui, une fois sa déclaration faite, est passé à autre chose, sans rien faire pour empêcher cette catastrophe. Les travailleurs belges ont des raisons de se souvenir d'un autre Premier ministre, français celui-là et socialiste, Jospin, qui avait accepté la fermeture de l'usine Renault de Vilvorde, sans rien faire non plus, il y a très exactement dix ans. Pourtant, à l'époque, l'État était encore actionnaire majoritaire de Renault.

L'annonce faite par Volkswagen fait suite à d'autres tout aussi catastrophiques pour les travailleurs. Il y a un mois, c'est le PDG du trust Peugeot-Citroën qui annonçait la suppression de 10000 emplois. Et, derrière ces grandes entreprises d'automobiles, combien de sous-traitants, combien d'équipementiers suppriment des emplois ou ferment carrément des usines, de Faurécia à Thomé-Génot, en passant par Delphi, TRW ou Visteon?

La direction de Peugeot a invoqué, en guise de justification, la stagnation des ventes depuis un an.

Mais pendant les années précédentes, lorsque les ventes comme le cours des actions en Bourse montaient en flèche, celles de PSA comme de la plupart des constructeurs d'automobiles, cela n'a profité qu'aux actionnaires, pas aux travailleurs. Au contraire, c'est par leur fatigue et au détriment de leur santé que les chaînes de production tournaient plus vite. Alors, pourquoi faut-il que ce soient eux, et eux seuls, qui paient pour le plafonnement des ventes depuis un an?

On nous dit que c'est le marché et qu'il faut qu'une entreprise s'adapte à ses fluctuations. C'est comme cela que les patrons justifient la flexibilité des horaires et des effectifs. Mais pourquoi faut-il que ce soit l'emploi des travailleurs ou leur salaire qui soit flexible? Pourquoi pas les dividendes des actionnaires?

Cela devrait être sur leurs dividendes passés et présents, c'est-à-dire sur le profit accumulé pendant les années où les ventes allaient bien, qu'il faudrait prendre de quoi faire face aux périodes où les ventes vont moins bien, en répartissant le travail entre tous mais sans toucher aux salaires.

Les entreprises de l'automobile continuent à faire du profit. Les actionnaires ne sont pas sur la paille. Mais on licencie, on accroît le chômage pour faire plus de profit avec moins d'ouvriers.

Et c'est toute l'économie qui fonctionne comme cela. À côté des grandes entreprises de l'automobile, combien d'autres licencient dans les secteurs les plus variés: de Corsair aux sous-traitants d'Airbus, en passant par Thomson, Duralex ou les bas Dim?

Les conseils d'administration des grandes entreprises, représentant les intérêts de quelques poignées de riches actionnaires exclusivement préoccupés par leur profit, ont le droit souverain de décider du salaire, de l'emploi de leurs travailleurs et des conditions d'existence de leurs familles. L'accroissement du chômage, l'extension de la précarité et tous les maux qui en découlent pour la société viennent de leurs choix.

Le gouvernement de droite qui dirige le pays depuis quatre ans est ouvertement à leur service. Rien qu'en cela, il montre qu'il est l'ennemi direct des travailleurs. Mais quel crédit les classes populaires peuvent-elles accorder à la gauche lorsqu'elle promet le changement? Comme par le passé, elle ne s'en prendra pas à la mainmise du patronat sur l'économie. Elle nous soûle aujourd'hui de paroles d'espoir, mais elle ne fera rien, demain, contre le chômage, rien contre les bas salaires et la précarité, rien contre l'appauvrissement continu du monde du travail.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 27 novembre

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