Liban : L’ONU n’est pas impuissante, elle est complice11/08/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/08/une1984.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Liban : L’ONU n’est pas impuissante, elle est complice

Voilà près d'un mois que les villes et les villages du Liban sont pilonnés jours et nuits par l'aviation israélienne. Ce sont les fiefs du Hezbollah qui sont pris pour cibles, affirment les autorités israéliennes et répètent, après elles, la plupart des commentateurs. C'est à voir, mais ce qui est certain c'est que ce sont surtout les quartiers pauvres.

On a pu voir dimanche, à la télévision, un officier supérieur israélien déclarer, à propos de la mort de quinze personnes, dont douze soldats, tuées par une «katioucha», qu'il avait assisté à un spectacle affreux. C'était certainement le cas. Mais les images des centaines de femmes, d'hommes, d'enfants, massacrés par les bombes israéliennes, au Liban et à Gaza, sont-elles moins horribles?

Pendant ce temps-là les grandes puissances discutent gravement au Conseil de sécurité de l'ONU de textes de résolutions qui ne changeront rien, mais qui leur permettent de faire croire qu'elles cherchent une solution à la crise, alors qu'elles ne visent qu'à donner à l'armée israélienne le temps qu'elle réclame pour écraser des adversaires qui se révèlent plus coriaces que ce que les stratèges de l'État hébreu avaient prévu.

Et toutes ces grandes puissances d'invoquer -sans détour pour les USA, hypocritement pour la France, qui voudrait bien continuer à faire des affaires avec l'Iran - la responsabilité de ce dernier pays et de la Syrie dans le drame que vit le Liban. Comme si toute la situation de la région n'était pas d'abord déterminée par le problème israélo-palestinien.

Des centaines de milliers de Palestiniens ont été contraints de fuir en 1948, après la proclamation de l'État d'Israël, et vivent toujours, eux ou leurs descendants, dans des camps de réfugiés, au Liban ou à Gaza. Au lendemain de l'occupation par Israël, en 1967, de la Cisjordanie et de Gaza, l'ONU avait adopté une résolution demandant l'évacuation des territoires occupés. C'était uniquement pour la forme, car cette résolution est restée lettre morte. Non seulement ces territoires n'ont pas été libérés, mais l'installation de colonies israéliennes dans les territoires occupés a réduit comme peau de chagrin ce qui aurait pu devenir un État palestinien.

Les grandes puissances ont d'autant plus facilement laissé faire que la haine inévitablement engendrée par cette situation parmi les populations arabes les servait. L'impérialisme ne manquait certes pas d'alliés dans la région, parmi tous les États arabes qui, de l'Arabie saoudite à la Jordanie, entretenaient les meilleures relations avec les grandes puissances impérialistes. Mais comme ces États étaient à la merci d'une explosion de révolte de leur propre population, aucun allié n'était plus sûr pour l'impérialisme qu'Israël, citadelle isolée dans un environnement hostile. Israël dépend en effet de l'aide des grandes puissances, tant que son gouvernement se refuse à tendre la main au peuple palestinien, à favoriser dans les faits la naissance d'un État palestinien.

Le conflit qui se déroule aujourd'hui au Liban n'a pas d'autre origine. Les dirigeants israéliens ont entraîné depuis plus d'un demi-siècle leur peuple dans ce piège sanglant, qu'il ait été consentant ou pas dans sa majorité importe peu.

Et les morts civils et militaires que déplore aujourd'hui Israël sont les victimes de ce piège sanglant, tout comme les enfants, les femmes et les hommes enterrés dans les décombres de Gaza et des villes libanaises.

«Un peuple qui en opprime un autre ne saurait être un peuple libre», proclamait le mouvement ouvrier lorsque les partis socialistes ne s'étaient pas encore transformés en défenseurs des intérêts des capitalistes. Cela vaut encore aujourd'hui. La liberté pour tous les peuples, et une paix durable, ne pourront exister que le jour où l'humanité se sera débarrassée de ce système économique qui n'hésite pas à semer la guerre dans toutes les régions de la planète chaque fois que quelques grands trusts, pétroliers ou pas, ou les États qui les représentent, y trouvent leur intérêt.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 7 août

Partager