Arlette Laguiller - Lundi 5 juin - Sous le signe de l’internationalisme prolétarien07/06/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/06/une1975.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Divers

Arlette Laguiller - Lundi 5 juin - Sous le signe de l’internationalisme prolétarien

«(...) Nous avons aussi toujours placé notre fête sous le signe de l'internationalisme. Notre internationalisme n'a pas pour base la seule solidarité mais la conviction profonde que l'organisation sociale future pour laquelle nous militons, la société communiste, ne peut être réalisée qu'à l'échelle internationale.

L'économie est mondialisée depuis bien longtemps, et ceux qui prétendent combattre les dégâts du capitalisme au nom de la lutte contre la mondialisation se trompent de combat, même lorsque leurs motivations sont sincères. Le vrai combat doit être pour une société définitivement débarrassée du marché, du profit, de la propriété privée, de l'exploitation et de l'oppression, des crises économiques et des guerres. Une telle société ne pourra être que mondialisée.

Oui, les liens économiques d'aujourd'hui se tissent à l'échelle mondiale. Ce dont souffre aujourd'hui la société, ce n'est pas de la mondialisation, mais de la dictature d'un nombre restreint de groupes industriels et financiers, en concurrence les uns avec les autres. Ce dont elle souffre, c'est que toute l'activité économique, toutes les immenses possibilités scientifiques, technologiques et productives de la société soient subordonnées à la recherche du profit par une petite minorité qui contrôle les richesses du monde et les moyens de les produire.

La mondialisation, elle, c'est la marche vers l'avenir mais qui ne pourra permettre une nouvelle période d'épanouissement de la société qu'à la condition qu'au lieu de subir les lois aveugles du marché, l'humanité puisse enfin maîtriser consciemment sa propre activité productive pour assurer à chacun selon ses besoins.

Parmi les nombreuses manifestations du cours réactionnaire des choses aujourd'hui, il y a le repliement communautaire à l'intérieur de sociétés ou le repliement sur les États nationaux de plus en plus fragmentés. (...)

Face au repliement communautaire, nous continuons à défendre l'idée que les travailleurs de toutes origines doivent s'unir sur la base de leurs intérêts de classe pour s'opposer plus efficacement au patronat. Et face au repliement nationaliste, tout en défendant le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, nous continuons à défendre cette idée qui est la conclusion du Manifeste communiste de Marx: «Prolétaires de tous les pays, unissez-vous!».

L'ordre impérialiste mondial, ce sont des guerres en permanence

Le capitalisme, c'est l'exploitation des travailleurs, oui, mais c'est aussi l'impérialisme, la domination de la bourgeoisie d'un nombre restreint de pays développés sur le restant de la planète. Le capitalisme, c'est le creusement des inégalités à l'intérieur de la société de chaque pays, entre une petite minorité de possédants et la majorité travailleuse de la population, oui. Mais c'est aussi le creusement des inégalités entre pays par le pillage des pays pauvres par la bourgeoisie des pays riches. Et ce sont aussi les guerres pour protéger l'ordre impérialiste mondial.

On prétend que les soixante dernières années, qui nous éloignent de la Deuxième Guerre mondiale, constituent une longue période de paix. Mais les guerres n'ont jamais cessé sur la planète!

Que signifie le mot «paix» pour la population d'Irak ou celle d'Afghanistan? Et il faut rappeler que si, en Irak, l'impérialisme français a refusé de participer à l'aventure militaire initiée par l'impérialisme américain, il n'en va pas de même en Afghanistan où des militaires français participent à une guerre dont on dit qu'elle est menée contre les fanatiques réactionnaires talibans mais dont la victime est en réalité la population afghane.

Et notre impérialisme participe au concert des nations impérialistes qui menacent l'Iran parce que les dirigeants de celui-ci revendiquent des droits dont les nations impérialistes veulent conserver le quasi-monopole, comme la maîtrise de la filière nucléaire.

Les mêmes puissances qui menacent l'Iran pour justifier leurs pressions brandissent devant les peuples le danger nucléaire. Les dirigeants de l'Iran exercent une dictature réactionnaire sur leur peuple mais, que l'on sache, la seule puissance assez irresponsable devant l'avenir de l'humanité pour s'être servie de l'arme nucléaire, ce sont les États-Unis! Et la quasi-totalité des essais nucléaires sont le fait de trois puissances impérialistes, dont la France.

Et que signifie le mot «paix» pour le peuple palestinien à qui on dénie depuis toujours le droit à l'existence nationale? Depuis bien des années, les territoires palestiniens, de la Cisjordanie à Gaza, sont transformés en une multitude de territoires, divisés géographiquement et transformés en autant de camps de concentration. Mais aujourd'hui, cela se matérialise clairement par la construction d'un mur, enfermant la population palestinienne et la laissant au chômage et dans la misère.

Depuis que le Hamas est arrivé au pouvoir, l'État d'Israël soutenu par les grandes puissances resserre encore l'étau autour du peuple palestinien, en refusant à l'Autorité palestinienne même le peu de rentrées financières lui permettant d'avoir un minimum d'existence. Eux qui prétendent défendre la démocratie ont décidé d'affamer toute la population palestinienne pour la punir d'avoir voté pour le Hamas. (...)

Mais le pire, c'est que c'est surtout pour le peuple palestinien que l'arrivée au pouvoir de cette organisation réactionnaire qu'est le Hamas représente un drame immense. C'est l'aboutissement ultime de toute une politique dans laquelle ses propres dirigeants ont enfermé un peuple qui montre tant de courage, tant de combativité, et depuis tant d'années, contre l'oppression qu'il subit. Les classes populaires de Palestine qui portent ce combat avaient au début de leur révolte d'immenses possibilités de se faire entendre des opprimés de la région, de se faire entendre de ceux du Liban, d'Égypte, de Syrie, de Jordanie, et au-delà, de tout ce Moyen-Orient où il n'y a pas que l'État d'Israël qui représente l'ordre impérialiste, mais aussi la monarchie d'un autre âge d'Arabie saoudite, les dictatures de Syrie ou d'Égypte ou les émirats d'opérette du Golfe. Le peuple palestinien avait la possibilité, la capacité, d'être le moteur d'une révolte générale des classes exploitées du Moyen-Orient, ayant la force d'imposer des changements réels sur le terrain des droits démocratiques, des droits des femmes, mais aussi sur le terrain social. Mais les dirigeants nationalistes de l'époque, même ceux qui se revendiquaient du progressisme ou du socialisme, n'ont pas voulu de cela. Ils ont limité leur combat au seul cadre palestinien empêchant ainsi que la révolte des opprimés palestiniens soit contagieuse, qu'elle puisse déboucher sur des bouleversements dans toute la région, comme elle avait commencé à le faire au Liban. (...)

Du face à face entre un État d'Israël enfermé dans la politique sioniste et une Palestine soumise aux intégristes du Hamas, il ne peut résulter que des souffrances pour le peuple palestinien surtout, mais aussi pour le peuple israélien. Car, on ne le répètera jamais assez: un peuple qui en opprime un autre ne peut pas être libre.

En Irak, en Afghanistan ou en Palestine, c'est l'impérialisme américain qui joue un rôle majeur dans la guerre contre les peuples. Mais ce qui vient de se passer au Tchad cette année, comme ce qui s'est passé en Côte-d'Ivoire l'année précédente, nous rappelle qu'à son échelle notre impérialisme, l'impérialisme français, continue à jouer le même rôle en Afrique. Il continue à s'imposer dans son ancien empire colonial, à soutenir des dictatures infâmes et à les armer contre leurs propres peuples. Parce que, pour pauvre que soit sa population, les grands groupes capitalistes, les Bolloré, Bouygues et bien des banques, trouvent encore le moyen de continuer à piller l'Afrique et à exploiter ses habitants.

Ceux qui essaient de fuir la misère vers l'Europe où ils ont l'illusion qu'ils trouveront du travail trouvent sur leur chemin des barbelés dont l'Europe s'entoure de plus en plus. Et ceux qui parviennent à les franchir trouvent de l'autre côté Sarkozy et ses semblables des autres États d'Europe.

Il ne faut pas accepter cela. Le chômage, la dégradation du sort des travailleurs, n'ont rien à voir avec l'immigration. Seule la classe capitaliste et son avidité en sont responsables.

Alors, notre combat, c'est contre tout cela. Et tout cela, les guerres, l'oppression, la montée d'idées réactionnaires, sans oublier l'empoisonnement progressif de la planète par la pollution, est l'expression d'une organisation économique et sociale non seulement incapable de faire progresser l'humanité, mais dont le seul maintien est sans cesse responsable de nouveaux dégâts.

Une organisation économique où les progrès scientifiques et techniques eux-mêmes creusent les inégalités, au lieu de les résorber, est condamnée tôt ou tard à disparaître. (...)»

Partager