Prix de l'eau : La soif de profits des multinationales01/02/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/02/une1957.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Prix de l'eau : La soif de profits des multinationales

Au moment où arrivent les factures d'eau avec des augmentations non négligeables (+ 5% en Ile-de-France, + 6,14% à Paris), Que Choisir?, mensuel de l'Union fédérale des consommateurs, publie une enquête sur le prix de l'eau qui révèle l'ampleur des profits faits par les sociétés chargées de sa distribution.

Il s'agit de multinationales car 80% de la distribution d'eau sont assurés par la Générale des Eaux, rebaptisée Véolia, par la Lyonnaise des Eaux, du groupe Suez, et dans une moindre mesure par la SAUR (Société d'aménagement urbain et rural), ancienne propriété de Bouygues qui en possède encore 15%.

L'enquête, réalisée en étudiant les rapports annuels d'une trentaine de villes de taille différente, fait apparaître que "les grosses agglomérations facturent l'eau à un tarif très excessif au regard des coûts réels". Ainsi, Strasbourg et Lyon facturent l'eau presque deux fois son prix; à Bordeaux, la Lyonnaise des Eaux aurait encaissé un trop perçu de 29,3 millions d'euros entre 1997 et 2003; mais la palme revient à l'Ile-de-France, où le Sedif, Syndicat des Eaux d'Ile-de-France, gestionnaire pour toutes les agglomérations, Paris excepté, a un contrat avec Véolia et facture l'eau deux fois et demie ce qu'elle coûte.

Normalement, le prix de l'eau devrait être moins élevé dans les grandes villes: vu le nombre de consommateurs, le coût des installations est amorti beaucoup plus vite; l'auteur de l'enquête explique d'ailleurs que "dans les grandes villes, il y a un habitant pour deux mètres de tuyau, contre un habitant pour vingt mètres dans les petites villes". Il nie que la pollution plus importante dans les grandes villes soit la cause de plus grandes dépenses d'assainissement, car l'usine coûte cher au début mais ces stations de traitement sont presque entièrement automatisées et le traitement ne représente que 5% de la facture.

En fait, en Ile-de-France, le Sedif paie ses fournitures beaucoup trop cher: un branchement est facturé 2500 euros alors que Nantes, par exemple, les paie 850 euros. Mais les entreprises chargées des travaux pour le Sedif sont, pour l'essentiel la Sade et la Setha, filiale de Véolia qui distribue l'eau. Comme l'indique Que Choisir? "le pactole se partage en famille, au sein du groupe Véolia".

Face aux trusts de l'eau, un certain nombre de municipalités essaient de renégocier avec les sociétés de distribution des conditions moins défavorables ou disent envisager un retour aux régies municipales. Paris a ainsi pu maintenir le mètre cube d'eau à un prix moins élevé que dans d'autres grandes villes, en imposant aux distributeurs qu'ils réalisent cent millions d'euros d'investissements supplémentaires sans hausse de coût.

Mais il reste toutes les petites communes: selon Que choisir?, le prix de l'eau y est plus proche de son prix de revient mais, en raison de l'amortissement des équipements, il égale ou excède parfois celui du mètre cube dans les grandes villes. Cela prouve qu'en dehors des surfacturations indues, le scandale est plus général: il consiste à soumettre la distribution de l'eau à la loi du profit au lieu d'en faire un service public également accessible à tous, sur tout le territoire.

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