Mittal : Un groupe indien ou un groupe capitaliste?01/02/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/02/une1957.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Mittal : Un groupe indien ou un groupe capitaliste?

L'OPA de Mittal Steel sur Arcelor a aussitôt soulevé une vague de réactions contre "l'étranger", en l'occurrence contre les capitalistes indiens qui se lanceraient à l'assaut des entreprises européennes ou américaines. Le ministre des Finances, Thierry Breton, tente même de convaincre ses collègues européens de venir à la rescousse d'Arcelor contre ce groupe "indien". Mais il se trouve que ce groupe prétendument indien est aussi très européen.

Car si son PDG, Lakshmi Mittal, est bien né en Inde, il réside à Londres. Son groupe a sa direction opérationnelle dans la capitale britannique et son siège à Rotterdam, aux Pays-Bas. Il est juridiquement un groupe néerlandais. Aucune de ses entreprises n'est même située en Inde! Par contre nombre de ses usines sont en Europe. En France, c'est lui qui possède Unimetal depuis 1999. Autant dire que l'Inde n'est pas pour grand-chose dans ce bras de fer entre deux grands groupes capitalistes.

D'ailleurs Lakshmi Mittal ne serait pas le premier à être né dans un pays du Tiers Monde et à avoir bâti sa fortune en dehors de son pays d'origine en exploitant des travailleurs de tous les continents. Il se comporte en cela comme tous les PDG des multinationales. Cela n'empêche nullement le PDG d'Arcelor de se livrer à une grossière démagogie en déclarant: "Arcelor et Mittal ne partagent ni la même vision stratégique, ni le même modèle de développement, ni les mêmes valeurs." Pas les mêmes valeurs? Mais Arcelor se livre depuis deux mois à une OPA hostile contre un groupe canadien qu'il vient de racheter! Qu'à cela ne tienne, il affirme que Mittal Steel a "des usines à bas coûts produisant des aciers bas de gamme, avec un fort taux d'accidents du travail". Comme si Arcelor payait bien ses ouvriers et se souciait de leur santé, alors qu'il est engagé dans un plan de licenciement de milliers de travailleurs, dont plus de mille en France, et qu'il contraint certains à travailler au-delà de 60 ans et jusqu'à 64 ans. Et pourtant il fait des bénéfices considérables (730% d'augmentation entre 2003 et 2004) mais ceux-ci sont en grande partie distribués aux actionnaires ou servent aux opérations de rachat.

Dès l'annonce de l'OPA, l'action de Mittal a bondi de 4% et celle d'Arcelor de plus de 28% en une journée. Derrière chacun des deux groupes, il y a de grandes banques européennes et américaines: derrière Arcelor, il y a Merrill Lynch, la Deutsche Bank, l'Union des Banques Suisses et la BNP. Derrière Mittal Steel, il y a Goldman Sachs, Citigroup, HSBC et Crédit Suisse.

Autant dire que tous les discours sur "la défense de la sidérurgie française et européenne" sont trompeurs et sont de la pure démagogie. Dans ce bras de fer entre requins du monde de la finance, les travailleurs n'ont à prendre le parti d'aucun patron mais bien plutôt à se préparer à défendre leurs propres intérêts contre tous.

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