Contrat première embauche : Une attaque supplémentaire contre les travailleurs01/02/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/02/une1957.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Contrat première embauche : Une attaque supplémentaire contre les travailleurs

À entendre Villepin, le contrat première embauche qu'il veut instituer pour les jeunes de moins de 26 ans serait un vrai CDI, en mieux! C'est, dit-il, "une entrée directe dans un emploi stable", "un parcours solide d'accès à l'emploi", "un vrai contrat de travail en entreprise" avec "une vraie rémunération". Quant à la période d'essai de deux ans avant que le CPE puisse déboucher sur un CDI, le Premier ministre n'appelle pas cela de la précarité, mais une "période de consolidation de l'emploi"!

Un emploi stable, un parcours solide? Parlons-en! Pendant deux ans, l'employeur peut rompre ce contrat à tout moment, sans justification, avec seulement un préavis de quinze jours. Comment, dans ces conditions, un jeune peut-il faire des projets, avec la crainte d'être licencié à tout moment, même s'il fournit un travail irréprochable aux yeux de son employeur? Les CDD sont déjà un contrat au rabais, mais au moins, le salarié en CDD sait qu'il va toucher un salaire pendant la durée de son contrat. Avec un CPE, le jeune ne sait pas s'il va travailler trois jours, une semaine, quelques mois, ou s'il aura la chance de franchir le cap de la "consolidation".

Car, à supposer qu'un jeune en CPE arrive à la fin de sa période d'essai, rien n'oblige le patron à l'embaucher. Il peut très bien le licencier juste avant d'arriver aux deux ans fatidiques. Il aura même tout intérêt à le renvoyer pour en embaucher un autre, afin de bénéficier plus longtemps de l'exonération des charges qui lui est accordée.

Villepin tente de minimiser le poids de cette période d'essai de deux ans en disant qu'elle sera réduite de la durée des stages, CDD ou formations en alternance accomplis préalablement dans la même entreprise. Quand on sait comment les jeunes sont ballottés d'une entreprise à une autre, quel que soit leur statut, pendant des années, la période d'essai ne baisserait que de quelques mois au grand maximum, ce qui est loin de la ramener au niveau de celle d'un CDI actuel, qui est de un à trois mois.

Le Premier ministre affirme aussi que le CPE offre des garanties supérieures en cas de chômage, puisqu'il ouvre le droit à une indemnisation au bout de quatre mois de travail, au lieu de six sur les vingt-deux derniers mois pour les autres contrats. Le jeune toucherait alors une indemnité de chômage de 460 euros (ce qui ne fait guère que vingt-sept euros de plus que le RMI)... mais pendant deux mois seulement. De même, il aurait droit à des indemnités de licenciement en cas de rupture de contrat, ce qui est tout de même la moindre des choses.

Le contrat première embauche n'apporte aux jeunes que la précarité et l'incertitude du lendemain. En outre, contrairement à ce que voudrait faire croire le gouvernement, il n'y a aucune garantie que ce contrat débouche ensuite sur un emploi stable en CDI. Les patrons n'embauchent que lorsqu'ils ont besoin de main- d'oeuvre, et rien ne dit que le CPE va permettre de créer de nouveaux emplois. En revanche, pour les patrons qui avaient de toute façon prévu d'embaucher des salariés, c'est tout bénéfice. D'abord à cause de l'exonération de toutes les charges sociales pendant trois ans, s'ils embauchent un jeune de moins de 26 ans au chômage depuis au moins six mois. Ensuite, pendant deux ans, ils pourront faire pression sur le jeune qui espère ensuite être embauché en CDI afin qu'il travaille le plus possible et s'abstienne de revendiquer, voire même de faire respecter ses droits.

Le contrat première embauche, ce n'est pas "la consolidation de l'emploi", mais bien celle des finances des patrons, et des pouvoirs qu'ils auront sur les travailleurs.

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