Amiante : "Les empoisonneurs doivent être jugés"21/10/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/10/une1942.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Amiante : "Les empoisonneurs doivent être jugés"

Samedi 15 octobre, plusieurs milliers de personnes ont manifesté à Paris, à l'appel de l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva) à laquelle s'étaient associés les syndicats CGT, CFDT, CFTC, la Fédération mutualiste et Lutte Ouvrière, pour que l'on rende justice aux victimes de l'amiante et que les responsables des 3000 morts par an soient traduits devant la justice pénale.

La manifestation a débuté devant l'ex-chambre patronale de l'amiante qui a monté la garde pendant des dizaines d'années sur les intérêts financiers des entreprises productrices Eternit, Saint-Gobain, Amisol, Latty, Turner et Newhall, etc. Les patrons de ces entreprises et de beaucoup d'autres savaient pertinemment les risques qu'ils faisaient courir à leurs salariés dont beaucoup sont morts d'un cancer de l'amiante ou sont atteints de plaques pleurales, ainsi que le rappelaient les délégations venues de Port-de-Bouc, Clermont-Ferrand, Thiant, Albi, Andancète. Jusqu'à l'interdiction de l'amiante en 1997, ces patrons ont tout fait pour poursuivre la production et l'utilisation de ce matériau, avec la complicité des gouvernements successifs. Mais aujourd'hui, ils veulent éviter le retour sur leur passé.

Derrière la banderole de tête "Les empoisonneurs doivent être jugés", venait le cortège des veuves de l'amiante de Dunkerque qui portaient la photo de leur mari mort d'un cancer de l'amiante après de longues souffrances. Depuis décembre 2004, elles manifestent toutes les trois semaines à Dunkerque pour exiger que quatre plaintes, déposées il y a huit ans contre des responsables d'entreprises, donnent lieu à un procès pénal. Un juge d'instruction de Dunkerque en décembre 2003, puis la cour d'appel de Douai en 2004 s'y sont refusés au nom de la loi promulguée par le gouvernement Jospin sur les "délits non intentionnels", comme si ces patrons n'avaient pas pris sciemment le risque de tuer des ouvriers. La Cour de cassation doit se prononcer au mois de novembre. Jusqu'à présent, aucune des quinze plaintes déposées dans le pays n'a abouti à une procédure pénale.

Parmi les manifestants, il y avait un grand nombre d'ouvriers des chantiers navals et arsenaux de Cherbourg, Lorient, Brest, Saint-Nazaire, Dunkerque où l'amiante était massivement utilisé et où le nombre des malades et des morts grandit toujours. Des cheminots de Bordeaux dénonçaient ainsi le fait qu'ils avaient été atteints en posant et en démontant des panneaux en amiante sur des autorails.

À la fin de la manifestation près du ministère de la Justice, François Desriaux, un des dirigeants de l'Andeva, a fustigé la politique du gouvernement qui fait de la démagogie à propos des "délinquants récidivistes", mais ne fait rien contre les patrons récidivistes et responsables des morts par l'amiante annoncées dans les décennies à venir, qui pourraient être près de 100000. Il a dénoncé cette hécatombe qui fait essentiellement des morts ouvriers, et son caractère de classe.

Plus que jamais, seul l'acharnement des victimes et de leurs proches, pourra faire bouger les choses.

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