SNCM : Le goût du service public06/10/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/10/une1940.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

SNCM : Le goût du service public

Le conflit à la SNCM a donné l'occasion à un certain nombre de politiciens de dénoncer, une fois de plus, le gaspillage dont seraient responsables les entreprises publiques et de vanter le dynamisme de sa concurrente, Corsica Ferries.

La SNCM reçoit effectivement depuis longtemps des aides publiques. Depuis 1976, au nom du principe de continuité territoriale, on a aligné les tarifs des transports maritimes sur ceux du kilomètre SNCF pour éviter de pénaliser les insulaires et de trop augmenter le prix des marchandises transportées en Corse; une convention, assortie d'une subvention, a alors été passée entre la SNCM et l'État. Depuis1982, c'est l'Assemblée régionale de Corse qui reçoit des fonds de l'État et gère ces aides, à travers son Office des transports. La subvention de continuité territoriale est attribuée aux lignes au départ de Marseille pour le fret et les passagers en échange d'un service public: c'est ainsi que la SNCM a touché, en 2004, 66 millions d'euros mais elle doit assurer un service sept jours sur sept entre Marseille et Ajaccio / Bastia tout au long de l'année, quel que soit le nombre de passagers. Par ailleurs, elle dessert aussi d'autres localités comme l'Ile Rousse, Porto Vecchio, Propriano, Calvi que sa concurrente, Corsica Ferries, ne dessert pas toutes.

On peut ajouter que les navires de Corsica Ferries n'offrent pas le même confort, et surtout ne font pas l'objet de la même maintenance que les navires de la SNCM, ce qui peut avoir aussi des conséquences sur la sécurité des passagers. Enfin, illustration de la désinvolture de ce gestionnaire privé, les navires de Corsica Ferries ont été pris à plusieurs reprises à effectuer des dégazages en pleine mer, avec la pollution correspondante.

Pourtant et toute privée qu'elle soit, cette compagnie n'en touche pas moins une aide de l'Office des transports corses. Il s'agit d'une «aide sociale», calculée par passager et censée faire baisser le prix du billet de façon à le rendre abordable pour toutes les liaisons à partir de Nice ou de Toulon, quelle que soit la compagnie. Là où la SNCM a touché 3,5 millions d'euros, Corsica Ferries en a touché 10,2 millions. Elle se vante d'en avoir bien fait profiter ses clients, en proposant des billets à 5 euros et se présente comme l'équivalent des compagnies aériennes à bas coût. Voilà qui n'a rien de très rassurant pour les passagers, par les temps qui courent!

En tout cas, son propriétaire Pascal Lota a fait une ascension fulgurante. Il a commencé les liaisons avec la Corse, à partir de l'Italie, avec des bateaux immatriculés au Panama. En 1999, il s'est installé à Toulon, ensuite à Nice pour profiter du trafic intense des mois d'été; aujourd'hui, si ses bateaux sont, pour l'essentiel, sous pavillon italien, les salaires et les avantages sociaux accordés au personnel sont, selon les syndicats de la SNCM, très différents: Corsica Ferries emploie en effet beaucoup de marins cubains ou panaméens.

On comprend qu'avec un tel exemple sous les yeux, les travailleurs de la SNCM n'aient absolument pas envie de se voir privatiser.

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