Amiante : Patrons voyous et assassins06/10/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/10/une1940.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Amiante : Patrons voyous et assassins

Samedi 1er octobre une stèle était inaugurée à Condé-sur-Noireau dans le Calvados en mémoire des victimes de l'amiante. Des victimes venant de toute la France participaient à cette cérémonie.

Pourquoi le choix de Condé-sur-Noireau? Les ateliers et usines de cette ville ont travaillé l'amiante pendant cent ans. On tissait l'amiante, l'industrie utilisait les matériaux produits, notamment à partir des années 1950 l'usine Ferodo, devenue Valeo, sous-traitant pour l'automobile. Les gens vivaient dans la poussière d'amiante. La vallée où était tissée l'amiante a pu être surnommée «vallée de la mort».

Mais Condé-sur-Noireau, c'est aussi là qu'eut lieu la première étude démontrant les risques mortels liés à l'amiante, effectuée par Denis Auribault, inspecteur du travail: c'était en 1906, et le rapport faisait état, déjà à l'époque, de cinquante décès imputables à cette matière, survenus en cinq ans dans une même filature. Alors, jusqu'en 1994, date de la fin du travail de l'amiante à Condé, depuis des décennies tout le monde connaissait les risques, et tous les patrons impliqués ont du sang sur les mains.

D'ailleurs les témoignages publiés par la presse locale à l'occasion de la cérémonie sont édifiants: des familles de huit enfants, tous atteints par les maladies de l'amiante; des rues de Condé-sur-Noireau où toutes les maisons comptent des malades; un ancien ouvrier réduit à passer 16 heures par jour avec une bonbonne d'oxygène, mais que les médecins n'ont voulu reconnaître amianté qu'à 40% , et dont la femme, qui raconte, a été contaminée par l'amiante rapportée chaque jour dans les cheveux de son mari; des médecins complices parlant systématiquement de «gros rhume» pour ne pas parler d'amiante; la réputation d'alcoolisme et de tabagie faite aux ouvriers pour justifier leur état de santé.

Les récits sont révoltants, non seulement à cause des souffrances des victimes, mais aussi parce qu'ils mettent en lumière la complicité de la plupart des notables et des pouvoirs publics.

Si des indemnisations et des retraites anticipées sont maintenant accordées, sous certaines conditions, aux victimes, les coupables n'ont jamais été jugés. La contamination par l'amiante tue 3000 personnes par an - 10 par jour.

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