Accidents aériens, contrôles et course au profit01/09/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/09/une1935.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Accidents aériens, contrôles et course au profit

Dans la présentation faite par les pouvoirs publics des circonstances qui ont entouré les catastrophes aériennes en série de cet été, les demi-vérités le disputent aux mensonges purs et simples.

Les autorités prétendent qu'elles n'auraient pas toujours la possibilité de savoir à quoi s'en tenir sur les normes de sécurité remplies par telle ou telle compagnie. Mais, pour savoir, encore faut-il le vouloir. Ce n'est pas le cas de ces ministres et responsables politiques qui couvrent un système du transport aérien lancé dans une concurrence effrénée, depuis que la «déréglementation» du ciel est devenue le maître-mot de la politique de tous les gouvernements.

Situé à Genève, le Bureau d'archives des accidents aéronautiques publie régulièrement des rapports chiffrés sur l'ensemble des accidents et incidents aériens à l'échelle du monde entier. À Bruxelles, des institutions de l'Union européenne collectent le même genre de données au niveau du continent. Toutes les informations voulues pourraient venir sur la place publique si les États, à commencer par les plus puissants, n'y mettaient pas leur veto. Car ce sont eux, au premier chef, qui ne veulent pas risquer de mettre en cause les énormes intérêts qui tournent autour du secteur aérien: ceux des compagnies, ainsi que ceux des constructeurs aéronautiques, des géants du tourisme, des groupes financiers qui ont investi dans ces activités, des chambres de commerce qui gèrent les aéroports, etc.

Chaque fois que survient une catastrophe aérienne, des responsables en appellent à plus de «transparence», en se désolant hypocritement de ce que, à les en croire, une harmonisation internationale de la sécurité aérienne serait impossible. Pourtant, s'il est un domaine où, dès l'origine, se sont mises en place des structures de régulation internationale, c'est bien celui du transport aérien. Mais ces organismes, aussi vieux que le transport aérien lui-même, n'ont jamais eu pour but premier d'assurer la sécurité des vols. Leur préoccupation, c'est d'organiser la sécurité d'une activité qui puisse, si possible, rapporter du profit.

Et dans ce cadre-là, celui de la course au profit, ni les «label bleu» et autre «liste noire» ne changent grand-chose à la réalité. Bien sûr, après des catastrophes comme celle de Charm el-Cheikh ou du Venezuela cet été, les médias d'ici pointent du doigt certains pays et les conditions dans lesquelles y opèrent certaines compagnies. Mais puisque, nous dit-on, ce dernier point ne relève que des États locaux, qu'est-ce qui empêche, ici, de contrôler et de bloquer éventuellement des avions dont même les passagers se rendent parfois compte qu'ils peuvent être dangereux? Le même manque de volonté politique que quand on nous dit, à chaque marée noire, qu'on ne pourrait pas vraiment contrôler tous les «navires-poubelles». Et s'agissant cette fois d'«avions-poubelles», ce n'est certainement pas avec 25 malheureux inspecteurs de la DGAC (dont à peine une demi-douzaine pour les deux principaux aéroports, ceux d'Orly et de Roissy) qu'on pourrait y arriver!

Partager