USA - Iran : La non-prolifération nucléaire... pour les autres17/08/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/08/une1933.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

USA - Iran : La non-prolifération nucléaire... pour les autres

À l'occasion du redémarrage du programme nucléaire civil par l'Iran, Douste-Blazy, ministre des Affaires étrangères, a reparlé de la nécessité de limiter la prolifération nucléaire et mis en accusation l'Iran, qui, du fait de son industrie atomique, représenterait un «danger réel».

Depuis 1945, le club des pays disposant de l'arme atomique s'était élargi aux autres «vainqueurs» de la Seconde Guerre mondiale, l'URSS, la Grande-Bretagne, la France et enfin la Chine. C'est notamment pour maintenir cet avantage que ces grandes puissances ont mis en place en 1970 un traité dit de non-prolifération nucléaire dont le but affirmé était d'empêcher d'autres pays de disposer de l'arme atomique.

Les signataires de ce traité -au nombre de 184 aujourd'hui- reconnaissaient aux seuls cinq pays qui avaient déjà la bombe le droit officiel d'en disposer. En «échange», ils s'engageaient à aider les autres pays à développer les usages civils du nucléaire. Mais plusieurs pays ont refusé de signer ce traité, dont l'Inde, le Pakistan et Israël, qui aujourd'hui possèdent la bombe atomique.

Bien sûr les partisans du traité de non-prolifération nucléaire expliquent que c'est le seul moyen d'empêcher une course à l'arme atomique comme celle qui s'est effectivement produite entre l'Inde et le Pakistan, en conflit larvé ou ouvert depuis leur indépendance. Mais c'est aussi et surtout le moyen pour les grandes puissances de contrôler ce que font les autres pays dans le domaine crucial de l'énergie nucléaire.

L'Iran est un pays signataire du traité de non-prolifération et il demande, ce qu'autorise le traité, à développer indépendamment son nucléaire civil. Les pressions de l'Union européenne (UE) pour que cela ne se fasse que sous contrôle international relèvent bien toujours de la même politique. L'argument invoqué est que, du civil au militaire, il n'y aurait qu'un pas, et que la bombe iranienne serait en préparation. Mais ce n'est pas un hasard si l'UE intervient au lendemain d'une élection présidentielle qui a porté au pouvoir un représentant de la fraction la plus intégriste des religieux iraniens. Elle a trouvé là l'occasion, à la suite des États-Unis, de montrer du doigt les nouveaux dirigeants de l'Iran.

Avant l'Iran, il y avait eu la Corée du Nord, dont la sortie du traité de non-prolifération en janvier 2003 avait déclenché les foudres du gouvernement américain, qui avait classé ce pays État dangereux. De même, avant l'intervention en Irak, les USA avaient inondé le monde d'informations et de photos satellites sur le prétendu programme nucléaire militaire de Saddam Hussein. Et on se rappelle comment les organismes de l'ONU et de l'Agence internationale de l'énergie atomique de Vienne s'étaient alors faits les agents des grandes puissances pour soutenir cette thèse, même si certains de leurs représentants avaient alors fait quelques réserves. On sait depuis ce qu'il fallait penser de la «bombe» irakienne et des soi-disant armes de destruction massive qui menaçaient la paix dans la région.

D'autres pays ont dû se soumettre aux pressions des pays impérialistes, comme la Libye, qui a signé en décembre 2003 avec les USA un accord renonçant à un programme nucléaire militaire, ou encore l'Afrique du Sud, qui, après la chute du régime d'apartheid, a démantelé son arsenal nucléaire, ou l'Ukraine qui en a fait autant après la chute de l'URSS.

En fait le traité de non-prolifération nucléaire officialise le droit pour les grandes puissances de disposer et de développer leur technologie nucléaire, tant dans le domaine militaire que civil, et... d'en limiter l'accès à tous les autres pays. Et elle le fait en particulier vis-à-vis de ceux soupçonnés de velléités d'indépendance par rapport aux USA.

Nous n'avons aucune sympathie à l'égard du pouvoir en place à Téhéran et de sa politique, qui se traduit d'abord par l'oppression de son propre peuple. Mais le fait est que, en ce mois anniversaire des bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki, le représentant de l'Iran à l'Agence internationale de l'énergie atomique a eu beau jeu de constater que «le seul État à avoir causé cette catastrophe unique en son genre par une double attaque sur notre Terre a maintenant endossé le rôle du prêcheur en chef contre la prolifération nucléaire, alors qu'il continue d'étendre sa capacité nucléaire». Et en effet l'impérialisme américain, qui dispose à lui seul de plus de la moitié de l'arsenal nucléaire mondial, continue de le développer, alors qu'une des clauses du traité de non-prolifération porte sur la réduction par les cinq puissances nucléaires officielles de leur arsenal de mort... Ce que ne respectent ni les États-Unis, ni leurs comparses, dont, ne l'oublions pas, la France.

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