Le gouvernement et les ordonnances : Pour faire passer les mauvais coups cet été24/06/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/06/une1925.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le gouvernement et les ordonnances : Pour faire passer les mauvais coups cet été

Après l'avoir annoncé lors de son discours programme à l'Assemblée nationale, Villepin devait présenter au Conseil des ministres le projet de loi qui autoriserait le gouvernement à légiférer par ordonnances sur l'ensemble des mesures annoncées. Cela veut dire en clair que celui-ci a la possibilité de promulguer des ordonnances qui ont sur-le-champ la valeur d'une loi, sans avoir à soumettre et à discuter de leur contenu au préalable. Et sans avoir besoin de les faire voter par les députés.

Au Parti Socialiste et au PCF, voire même parmi certains élus de droite, on a poussé des hauts cris pour protester "contre le mépris du rôle des députés". Comme si les députés dans le cadre de ces institutions avaient un autre rôle que d'approuver ce que le gouvernement en place leur propose! Il existe d'ailleurs d'autres procédures pour mettre au pas les députés d'une majorité qui se montreraient désobéissants ou renâcleraient par rapport au gouvernement qu'ils ont investi. La procédure guillotine étant celle du 49-3, où la loi est considérée adoptée telle qu'elle a été présentée par le gouvernement à défaut de l'adoption d'une éventuelle motion de censure.

Mais si justement le gouvernement a tenu à avoir recours à la procédure des ordonnances et pas aux autres, ce n'est pas tant à cause des difficultés qu'il pourrait avoir avec les députés qui le soutiennent, mais surtout pour éviter que la publicité faite autour de la discussion de ce projet ne provoque des discussions, et finalement des réactions au sein de la classe ouvrière. D'ailleurs le calendrier annoncé pour la promulgation de ces ordonnances est explicite: ce devrait être durant l'été, c'est-à-dire au moment où l'on peut penser qu'en pleines vacances les attaques passeront sans faire de vagues.

Car si dans les milieux populaires on a déjà été choqué par l'annonce du contrat "nouvelle embauche", qui transformerait les nouveaux embauchés en précaires permanents, des débats, peut-être longs, risqueraient d'entraîner une prise de conscience parmi les travailleurs de la gravité des attaques du gouvernement. D'ailleurs c'est à dessein que Villepin a fait donner Borloo, ministre du Travail, et son adjoint Larcher. Ceux-ci ont adopté un ton patelin et essayent de se montrer rassurants sur la forme, sans remettre en cause le fond des projets annoncés par Villepin.

En outre, procéder par ordonnances, c'est laisser aux députés de la majorité la possibilité de prétendre ensuite qu'ils n'étaient pas vraiment d'accord avec ces décisions.

Cela dit cette façon de faire n'a pas toujours porté chance à leurs auteurs, et Villepin, qui se targue de connaissances historiques, devrait s'en souvenir. En 1953 le gouvernement d'alors, dans un cours très réactionnaire comparable à celui d'aujourd'hui, avait décidé de faire promulguer pendant le mois d'août des décrets-loi s'attaquant aux droits des fonctionnaires et des salariés du secteur public. Spontanément, partie des postiers de Bordeaux, une grève générale gagna toute la fonction publique et les services publics, SNCF et RATP comprises, provoquant une paralysie du pays. Non seulement le gouvernement recula, mais cela marqua l'arrêt de l'offensive en cours et entraîna un regain de confiance et de combativité au sein de toute la classe ouvrière.

Alors, quelles que soient les manoeuvres gouvernementales, et malgré ce calendrier si méticuleusement calculé, les travailleurs peuvent encore faire remballer leurs projets à Villepin et à ses acolytes.

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