La droite veut concurrencer Le Pen15/06/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/06/une1924.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La droite veut concurrencer Le Pen

Dans l'actuel débat sur les quotas, la droite prétend se dégager de la façon dont le Front National a posé la question de l'immigration. Pour Le Pen et les racistes, les immigrés sont responsables de tous les maux, du chômage, du manque de logements sociaux, du déficit de la Sécu, etc. Du coup, vis-à-vis de ses électeurs les plus réactionnaires, la droite ne pouvait accepter l'immigration sans être accusée de nuire aux Français. Et inversement, aux yeux de la fraction la plus libérale de son public, si elle s'en prenait à l'immigration, elle était vue comme s'alignant sur Le Pen.

En parlant de quotas et de nécessités économiques, la droite essaie d'échapper à ce dilemme. Selon Eric Raoult, ex-ministre délégué à l'Intégration, c'est en ayant «une attitude décomplexée que l'on évitera les situations de rejet menant à des 21 avril». Et il confesse: «Pendant des années, nous avons eu la trouille d'être perçus comme parlant comme le Front National.»

Mais du coup, «décomplexés», les voilà qui annoncent haut et clair un nouveau renforcement de la politique anti-immigrés. Car s'il est entendu que les immigrés ne sont en France que pour travailler, il est normal de reconduire à la frontière un nombre toujours plus grand d'immigrés sans papiers ou sans travail, de faire la chasse à ceux qui travaillent «illégalement», de vouloir dépister les mariages blancs, de restreindre le plus possible la présence d'étudiants étrangers, en n'acceptant que les «prioritaires», c'est-à-dire ceux dont la formation permettra de combler une lacune.

La droite veut donc à la fois se présenter comme accueillante à l'égard des immigrés, des immigrés utiles bien sûr, et impitoyable à l'égard de ceux qu'elle considère comme inutiles, irréguliers, sans-papiers... Elle espère ainsi répondre sans peine aux critiques venant de la gauche comme à celles venant du Front National. Elle aura même sur ce dernier l'avantage de pouvoir dire que la maîtrise de l'immigration, non seulement elle en parle, mais elle la réalise. Tout cela dans l'espoir de prendre à Le Pen une partie de ses électeurs et de rétablir pour 2007 une concurrence droite-gauche qui ne soit pas dénaturée par la concurrence déloyale du démagogue raciste.

Partager