Une Constitution "sociale" ?28/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1917.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Une Constitution "sociale" ?

Les partisans du "oui" à la Constitution européenne insistent tous sur les avancées "sociales" incluses dans ce texte, et ne peuvent prononcer trois phrases sans que ce mot soit mis en avant.

Le traité constitutionnel prône une économie de marché? Oui, mais il s'agit d'une économie "sociale" de marché. Du côté gouvernemental, de Villepin a déclaré dans Le Parisien que "le traité impose une clause sociale dans tous les domaines et pour tous les pays", tandis que Raffarin, sur un site Internet, affirme que "l'Europe apporte des sécurités sur le statut social". Les socialistes Strauss-Kahn et Delanoë, favorables à la Constitution, y voient un texte qui "dessine l'Europe que nous voulons: une Europe politique (? ? ?) et sociale", comme ils disaient déjà l'an passé; "L'Europe sociale passe par le oui", reprend le Parti Socialiste dans sa campagne actuelle.

Mais il ne suffit pas de saupoudrer un texte avec le mot "social" décliné sous toutes ses formes pour que cela change sa nature. Dans ce système capitaliste, les plans de licenciements qui jettent à la rue des travailleurs par milliers sont eux aussi qualifiés de "sociaux", tout comme sont "sociales" les parts de gâteau que possèdent les actionnaires des entreprises! Et si l'on cherche, derrière les mots, en quoi cette Constitution pourrait être favorable aux travailleurs européens, on ne trouve rien de concret: rien sur une éventuelle lutte contre le chômage qui affecte les travailleurs de tous les pays d'Europe, ni sur un salaire minimum commun ou une limitation des horaires de travail; pas de législation commune prenant en compte les droits que les travailleurs de chaque pays ont conquis. Rien sur les systèmes de santé ou de retraite qui soit un progrès par rapport à ce qui existe actuellement, ni sur les droits au divorce ou à l'avortement. Toutes ces lois vont continuer à être votées pays par pays, comme auparavant, et ne pourront être favorables aux travailleurs que si ceux-ci imposent, par leurs luttes, qu'elles le soient.

Et puis, bien que ce texte, fait pour réguler les échanges économiques entre les États européens, n'ait rien de "social", cela n'empêche pas les tenants du oui d'affirmer sans vergogne qu'il défend obligatoirement des idéaux progressistes, puisque "la France" en est à l'origine! Passons sur le fait que l'initiateur en est Giscard d'Estaing, ancien président de la République pas spécialement connu pour être un défenseur des intérêts des travailleurs. Mais quand un proche de Barnier déclare que "les grands gagnants du non seraient les chantres de l'Europe libérale à l'anglo-saxonne" ou quand Raffarin et Villepin se font les défenseurs des services publics "à la française" qui seraient mieux protégés par la Constitution, on est en plein surréalisme. C'est bien ce gouvernement qui, poursuivant le travail entrepris par les précédents gouvernements socialistes, privatise à tour de bras afin de récupérer des fonds, qui réduit le nombre de fonctionnaires en France, qui supprime des bureaux de postes, des lignes de chemin de fer, ferme des services dans les hôpitaux, voire même des hôpitaux entiers, etc.

Les grands mots creux ne peuvent masquer une réalité bien concrète à laquelle la Constitution n'apporte aucune réponse: le chômage, la misère qui s'accroît, une dégradation importante des services publics. C'est cela, le "modèle social français" tel que le vivent les travailleurs de ce pays, et que l'on veut nous présenter comme un progrès.

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