Référendum : D'après eux, le chaos28/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1917.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Référendum : D'après eux, le chaos

D'après les partisans du "oui" la victoire du "non" au référendum du 29 mai plongerait le pays dans un chaos institutionnel, économique et politique. Raffarin résume cela en une phrase: "Le non porte le désordre".

Bien sûr la victoire du non empêcherait, par définition, la Constitution européenne de Giscard de s'appliquer. Mais si cela compliquerait bien un peu les choses pour l'organisation de l'Europe du capital, cela ne changerait rien de fondamental car les grands trusts qui dominent l'Europe ne soumettent pas leur pouvoir, ni même la façon dont ils l'exercent, aux suffrages populaires. La situation resterait ce qu'elle est: un chaos pour les classes populaires et un paradis pour les classes dominantes.

Mais c'est surtout du point de vue de la situation politique française que les partisans du oui, politiciens ou journalistes, prédisent un "séisme" en cas de victoire du non. Ils avaient employé ce terme le 21 avril 2002, lorsque Jospin avait été écarté du second tour de l'élection présidentielle, ne laissant en piste que Chirac et Le Pen. Pour ces gens-là, les électeurs, particulièrement ceux des couches populaires, seraient à nouveau tentés par "un coup de balai" contre les partis qui gouvernent, se laisseraient à nouveau conduire par "les frustrations et la cécité", bref, le "spectre du 21 avril hante la campagne électorale".

Hollande ne pouvant pas, et pour cause, convaincre l'électorat populaire qu'il a intérêt à approuver cette Constitution, essaye du moins de le convaincre que c'est mal de voter non. Il enfonce donc le clou en déclarant que: "Le Pen n'a pas besoin de faire campagne puisque les partisans du "non" le font pour lui". Jospin également a redit aux électeurs de gauche qu'en votant pour d'autres que lui, ils avaient assuré la présence de Le Pen au deuxième tour et qu'il ne fallait pas qu'ils refassent le même geste en votant non au référendum.

Cette façon d'assimiler le vote non au vote pour Le Pen n'est, encore une fois, qu'une façon de faire du chantage vis-à-vis de l'électorat de gauche. Ce chantage avait fonctionné en 2002 lorsque la gauche avait appelé à voter Chirac contre Le Pen, au deuxième tour de l'élection présidentielle. Jospin, alors Premier ministre d'un gouvernement dit de "gauche plurielle", grossissant la menace inexistante d'une victoire de Le Pen au second tour, avait réussi à passer sous silence le fait que c'est sa politique antiouvrière qui lui avait fait perdre des millions de voix... et Chirac avait tiré les marrons du feu avec 82% des voix.

Il n'est pas dit que cela marche de nouveau. La droite emploie vis-à-vis de son électorat des arguments du même tonneau (oui ou la catastrophe) parce qu'elle ne peut quand même pas dire tout net: "Vous êtes contents de la situation actuelle? Alors votez oui pour que ça continue". Cet argument pourrait être convaincant pour une partie de l'électorat de droite, mais, au contraire, il repousserait l'électorat du PS. Alors la droite demande à ses électeurs de voter oui pour échapper au "désordre" prédit par Raffarin ou à "l'isolement de la France" redouté par Sarkozy.

Pour couronner le tout, les tenants du oui, de Hollande à Sarkozy, accusent les électeurs des classes populaires de perturber le scrutin, parce qu'ils voteraient non pas sur la Constitution elle-même, mais en fonction de leur situation actuelle (bas salaires, menaces de licenciements, chômage, etc.) alors qu'on ne leur demande évidemment pas leur avis sur tout ça.

Ça, c'est un argument, car enfin où irait-on si les travailleurs se mettaient vraiment à voter, et surtout à agir, en fonction de leurs intérêts réels? Et dans ce cas-là que pourraient faire les gouvernements? Dissoudre le peuple, peut-être?

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