Dunkerque : La mobilisation continue contre les empoisonneurs15/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1915.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Dunkerque : La mobilisation continue contre les empoisonneurs

Le mardi 5 avril, le tribunal des affaires de la Sécurité sociale (TASS) de Lille a reconnu la faute inexcusable de l'entreprise sidérurgique Sollac de Dunkerque dans l'inhalation de poussières d'amiante durant leur travail par dix-neuf salariés. Il a indemnisé les dix-sept victimes, ainsi que deux familles de travailleurs décédés, d'une somme globale d'environ 1,3 million d'euros.

Mais si la responsabilité des employeurs est de plus en plus reconnue par les TASS, ce n'est pas le cas au niveau de la justice pénale. Un juge d'instruction de Dunkerque en décembre 2003, suivi par la cour d'appel de Douai en juin 2004, a ainsi refusé d'envoyer devant le tribunal correctionnel les responsables des entreprises (dont Sollac) mis en cause par une plainte déposée en 1997, s'appuyant sur la loi Fauchon qui permet de ne pas poursuivre s'il n'y a pas "délit intentionnel".

Certes, les patrons n'ont pas "intentionnellement" voulu tuer, mais la nocivité de l'amiante était largement connue depuis des dizaines d'années et ils ont continué à l'utiliser, exposant de nombreux salariés, ainsi qu'une partie de la population, aux dangers de ces fibres.

C'est pour demander la tenue d'un procès en correctionnelle, ce qui n'a encore jamais eu lieu en France, que pour la sixième fois depuis décembre dernier, 400 personnes ont manifesté le 6 avril autour du palais de justice de Dunkerque aux côtés des veuves de travailleurs morts d'un cancer dû à l'amiante. Il y avait dans le cortège des ouvriers des entreprises de la région particulièrement touchées (Usine des Dunes, Sollac...), mais aussi une importante délégation de l'Association régionale des victimes de l'amiante (Ardeva) de Seine-Maritime, du Havre, de Rouen, de Bolbec, Lillebonne, des ouvriers ayant travaillé dans les chantiers navals, les verreries, le bâtiment... Ils projettent, comme cela se fait maintenant à Toulon et à Bergerac, de défiler dans ces villes les mêmes jours qu'à Dunkerque.

Il y a aussi au fil des manifestations une présence de plus en plus affirmée du Parti Socialiste et de ses élus municipaux. Pourtant, quand le PS dirigeait le gouvernement, il n'a pas brillé par son empressement pour prendre les mesures visant à protéger les travailleurs. Il a fallu ainsi treize mois à la ministre du Travail et des Affaires sociales de l'époque, Martine Aubry, pour faire appliquer en 1992 une directive européenne restreignant l'usage de l'amiante.

De plus, c'est sous le gouvernement Jospin -et à l'unanimité- que la loi du sénateur UDF Fauchon sur les "délits non intentionnels", au nom de laquelle le non-lieu a été prononcé à Dunkerque, a été votée... Au début de l'année, l'Ardeva a adressé aux 880 parlementaires une lettre demandant sa révision. Elle n'avait obtenu, le 6 avril, que dix-sept réponses positives. Comme quoi les lois dont on peut se servir contre les travailleurs sont plus faciles à voter qu'à changer.

En tout cas, par ces manifestations régulières toutes les trois semaines, les victimes sont décidées à faire la pression nécessaire pour obtenir que les patrons empoisonneurs passent en justice.

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