Le vote NON pour rejeter une Constitution réactionnaire06/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1914.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Le vote NON pour rejeter une Constitution réactionnaire

Les partisans du «oui» au référendum sur la Constitution sortent la grosse artillerie pour contrer la montée du «non» dans les sondages.

Raffarin, ses ministres et Sarkozy ont occupé les médias pour tenter de convaincre les électeurs des charmes cachés de la Constitution (du moins les jours où le pape, sa vie, sa mort, son Église, ne les ont pas monopolisés, y compris la télévision et la radio d'un État en principe laïque).

Jeudi 7 avril, c'était Chirac soi-même, initiateur du référendum, qui allait s'y mettre. Il avait convoqué une cinquantaine de jeunes, sélectionnés par un institut de sondage, pour leur administrer un cours d'instruction civique largement télévisé, devant se conclure par un appel à voter «oui», avant de devoir remettre cet exercice à plus tard pour cause d'enterrement du pape.

Mais les chefs de la droite antiouvrière ont peu de chances de convaincre l'électorat populaire. Au contraire, plus Raffarin parle, plus le «oui» dégringole. Alors, c'est la direction du Parti Socialiste qui se charge de la besogne. «L'Europe sociale passe par le "oui"», affirme son affiche de campagne. Pour allécher son électorat, Hollande a même lancé, lors de son grand meeting de Marseille, que «le "oui" socialiste est un élément pour préparer la victoire de la gauche en 2007».

Même s'il attend beaucoup des élections, l'électeur socialiste a du mal à comprendre en quoi voter de la même façon que Chirac et Raffarin en 2005 pourrait favoriser la gauche en 2007. Et comment faire avaler qu'un projet de Constitution, rédigé sous l'autorité de Giscard et chaleureusement défendu par Chirac, Raffarin et Sarkozy, pourrait favoriser «l'Europe sociale»?

Leur «Europe sociale», on voit ce qu'elle est par les coups portés aux classes populaires en France. C'est le chômage qui s'aggrave, les salaires qui stagnent, les cotisations sociales qui montent, le pouvoir d'achat qui baisse, la précarité qui se généralise, la pauvreté qui s'étend. Ce sont les hôpitaux surchargés et les services d'urgence contraints de recourir à la grève illimitée pour protester contre le manque scandaleux de moyens et de personnel!

Les partisans du "oui" voudraient bien dissocier la Constitution européenne du mécontentement social. Ils voudraient bien que l'électorat populaire oublie les coups reçus du patronat et du gouvernement et qu'il vote "oui" en pensant que c'est mieux pour l'Europe. Mais cela ne marche pas car, au mieux, ce serait ce que nous avons déjà.

L'unification de l'Europe, la suppression des frontières sont de bonnes choses. Mais ce n'est pas une raison pour cautionner un projet de Constitution qui ne contient rien de bon pour les travailleurs de France et d'Europe et qui, par bien des côtés, est ouvertement rétrograde. Il l'est notamment en ce qui concerne les droits des femmes ou la place de la religion dans la société. Les travailleurs n'ont aucune raison non plus de cautionner un projet qui consacre juridiquement la domination des grandes puissances d'Europe occidentale et de leurs trusts sur la partie pauvre de l'Europe.

Il faut voter «non» pour rejeter cette Constitution. Mais une victoire du «non» ne changera rien à l'organisation économique et sociale, au capitalisme, à la course au profit, à la concurrence qui sont les causes des crises, du chômage et de la pauvreté. Le «non» au référendum n'empêchera pas un seul patron de licencier, pas plus qu'il n'obligera aucun d'entre eux à payer des salaires corrects.

Ce n'est certainement pas la Constitution européenne, qui n'est même pas encore décidée, qui est responsable des attaques contre les salaires, contre les retraites, contre les horaires de travail. Ces attaques, c'est le fait du grand patronat et des gouvernements qui appliquent la politique qu'il exige.

Alors, il faut voter «non» à cette Constitution, mais il faut surtout savoir que les travailleurs ne feront pas l'économie des luttes contre une classe capitaliste qui se moque d'appauvrir toute la population et de ruiner la société, du moment que ses profits augmentent.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 4 avril

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