Explosions dues au gaz : Gaz de France a freiné le remplacement des canalisations dangereuses13/01/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/01/une1902.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Explosions dues au gaz : Gaz de France a freiné le remplacement des canalisations dangereuses

À la suite de l'explosion due au gaz dans un immeuble de Mulhouse, qui a causé la mort de dix-sept personnes le 26 décembre dernier, Gaz de France a commencé par chercher à se disculper. Personne n'avait signalé d'odeur suspecte, avaient immédiatement déclaré les responsables de GDF, l'accident avait donc probablement eu lieu après les compteurs, c'est-à-dire sur des installations dont les locataires sont responsables. D'autant plus, disait GDF, que les canalisations avaient été vérifiées récemment.

Ce que GDF s'est bien gardé de dire, c'est que la canalisation qui alimentait l'immeuble, donc avant compteurs, était en fonte grise. Ce sont les enquêteurs qui l'ont dit lorsqu'ils ont décelé une fissure, et GDF a bien dû l'admettre. Cette fonte grise installée depuis une cinquantaine d'années dans tout le pays s'est révélée en vieillissant extrêmement cassante. Le passage de camions, des travaux dans le voisinage, voire un petit séisme comme il s'en était justement produit peu de temps avant dans la région de Mulhouse, suffisent pour provoquer des fuites, et donc des risques d'explosion.

Cela fait longtemps que Gaz de France le sait et a donc entrepris le remplacement systématique de ces tuyaux dangereux. Seulement, c'est en prenant son temps!

Ainsi, durant l'année 1993, près de 1700 kilomètres de canalisations avaient été remplacés. Mais il en restait encore près de 12000 km dans le pays. On aurait pu espérer que le rythme serait accéléré, ou tout au moins maintenu. C'est l'inverse qui s'est produit: à partir de 1994 le kilométrage de conduites changées a régulièrement diminué. En 1996 il n'était plus que d'un millier de kilomètres, en 1999 il était tombé à moins de sept cents.

Si le rythme de travaux de 1993 avait été maintenu, il n'y aurait plus eu de conduites en fonte grise en l'an 2000. On aurait certainement évité la catastrophe de Mulhouse, et très probablement celle de Dijon de décembre 1999 qui fit quatorze morts et qui elle aussi est vraisemblablement due à une fuite dans une telle canalisation, même si l'instruction judiciaire est encore en cours.

On estime que, depuis cinq ans, les explosions dues à ce défaut de conception ont causé trente morts et de nombreux blessés. Trente morts qui auraient pu être évités si Gaz de France s'était davantage soucié de la sécurité et du service public, plutôt que des investissements tous azimuts afin de devenir un groupe concurrentiel à l'échelle de l'Europe.

Certes le remplacement des tuyaux coûte cher. On évalue le coût pour les 2000 à 3000 kilomètres restants à un demi-milliard d'euros. Mais GDF fait bien davantage de bénéfices puisque ceux-ci, cumulés, représentent plus de cinq milliards d'euros depuis 1995, sans compter ce qu'il verse à l'État.

Les morts ont donc été provoquées par une politique volontaire d'économies sur ce qui est indispensable afin de favoriser les objectifs financiers. Le dirigeant d'GDF durant cette période, Gadonneix, est devenu récemment le président d'EDF. C'est dire qu'avec lui on a de quoi être rassuré en ce qui concerne les questions de sécurité!

Ajoutons que Gaz de France, afin de ne pas provoquer de panique sans doute, mène la politique du secret et se garde bien de dire les endroits qui sont encore desservis aujourd'hui par ces deux à trois mille kilomètres restants de canalisations dangereuses. Ce qui signifie qu'ils peuvent se trouver n'importe où et que tous les usagers du gaz peuvent s'estimer menacés!

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