Préretraites amiante : Ni l’État ni les patrons ne veulent payer23/12/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/12/une1899.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Préretraites amiante : Ni l’État ni les patrons ne veulent payer

Le ministère du Travail vient de rejeter les dossiers de 63 établissements, les plus importants, sur un peu plus d'une centaine, dont les salariés demandaient à pouvoir bénéficier des préretraites amiante. Parmi eux il y a des sites appartenant à l'Alstom, à Renault, à RVI, Valéo, Chaffoteaux et Maury ou les fonderies Valfond. Dans ces entreprises, des travailleurs sont morts, d'autres ont été gravement atteints par les maladies de l'amiante. Dans une aciérie du Puy-de-Dôme qui figure sur la liste des refusés, on a par exemple découvert cette année sur 110 travailleurs des plaques pleurales typiques de l'amiante. Cela n'a pas empêché le ministère du Travail de rejeter la demande.

Les préretraites amiante permettent, depuis 1999, à ceux qui ont travaillé dans un établissement utilisant ce produit de partir plus tôt, à 50 ans pour certains, selon le temps qu'a duré leur activité sur le site. Ils perçoivent une allocation égale à 65% de leur salaire calculé sur la dernière année. Encore faut-il pour cela que l'établissement soit inscrit sur la liste des sites concernés. Or le gouvernement bloque l'admission de nouveaux établissements dans le dispositif. En décembre 2003, la totalité des 70 dossiers présentés avait été rejetée.

Les préretraites amiante, ainsi d'ailleurs que la caisse d'indemnisation des victimes de l'amiante, sont principalement financées par la branche accidents du travail et maladies professionnelles de l'assurance maladie. Au fur et à mesure que se révèle l'ampleur de la catastrophe, les fonds nécessaires ne cessent d'augmenter. Ils sont passés de 480 millions d'euros en 2002 à 600 millions d'euros en 2004, dont 500 pour les préretraites et 100 pour l'indemnisation des victimes. Alors, le gouvernement freine des deux pieds. Et cela d'autant plus que cette branche accidents du travail est alimentée en totalité par les cotisations patronales.

Localement, les entreprises qui ont empoisonné à l'amiante leurs travailleurs savent utiliser le dispositif qui leur permet de mettre en place des départs anticipés qui ne leur coûtent rien. Cela leur permet même de faire parfois l'économie d'un plan social et des dépenses qui lui sont liées. Le patronat ne veut pas payer les dégâts qu'il a lui-même causés. C'est pourquoi le gouvernement nie de son côté tant qu'il peut l'évidence de l'exposition à l'amiante d'un grand nombre de travailleurs. Ainsi, d'un côté le système exonère les patrons de toute responsabilité, et de l'autre il multiplie les obstacles à l'application des mesures instaurées pour compenser, oh combien faiblement, les dégâts qu'ils ont causés. Et au bout du compte, ces patrons auront ruiné la santé de dizaines de milliers de travailleurs en pleine connaissance de cause et en toute impunité.

Une grande partie de leurs victimes, elles, n'auront même pas la possibilité de profiter en paix de leurs vieux jours. C'est un scandale, un de plus lié à l'amiante.

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