À l'occasion de la discussion de la loi dite de "cohésion sociale" au Parlement, la CGT diffuse à l'échelle nationale un tract intitulé: "Licenciements, la sécurité pour qui?"

Ce quatre-pages explique en quoi le gouvernement facilite la tâche aux licencieurs et réduit les droits des licenciés, et formule "cinq axes de propositions immédiates": la CGT propose "d'obtenir des droits pour les salariés des entreprises de moins de 50 salariés" et de "consolider les droits et les moyens d'intervention des salariés dans les entreprises de 50 salariés et plus". "Leur avis doit pouvoir compter à tous les moments de la vie de l'entreprise, en particulier au moment des crises et pas uniquement sur les conséquences sociales de ces crises".

C'est très juste! Les travailleurs doivent pouvoir intervenir dans la vie de l'entreprise, ne pas laisser le patron décider de tout et pour tous. Mais comment faire pour que ce contrôle soit réel, tant qu'ont force de loi le secret commercial, le secret bancaire, le secret des fortunes privées des directeurs et des actionnaires, le secret des montages juridiques qui font apparaître et disparaître bénéfices et pertes pour les besoins de la cause?

Le troisième "axe" propose de "sécuriser les parcours professionnels en créant une obligation de reclassement. [en cas de licenciement] Les salariés resteraient à l'effectif de l'entreprise, continueraient à percevoir leur rémunération qui serait prise en charge par leur entreprise ou par un fonds mutualisé régional". "Il serait normal en fait, qu'en cas de licenciement, les travailleurs restent payés à leur salaire par leur ancien patron jusqu'à ce qu'ils aient retrouvé un travail à un salaire équivalent et qui leur convienne". Mais peut-on espérer obtenir cela par une discussion avec le patronat et le gouvernement à son service?

Dans son quatrième point, la CGT veut "faire se rencontrer et se mobiliser les acteurs intéressés à la protection et au développement de l'emploi dans les différents territoires". Si cela signifie faire en sorte que la population et les travailleurs concernés "rencontrent" les patrons de la région on ne voit guère à quoi cela peut servir. À moins que les travailleurs ne se donnent les moyens, par exemple, de contrôler les subventions versées aux entreprises et leur utilisation, de contrôler les comptes des entreprises et des groupes qui menacent de fermer en ruinant leur ville ou leur région.

Enfin dans son cinquième point la CGT vise à "responsabiliser les grands groupes vis-à-vis de leurs sous-traitants". En effet tous les grands patrons utilisent la sous-traitance (et il faudrait ajouter les intérimaires et précaires) pour adapter en permanence leur effectif... sans avoir à licencier. Ce serait la moindre des choses que l'ensemble des travailleurs qui travaillent effectivement pour un même patron, aient les mêmes droits, les mêmes salaires, les mêmes conditions de travail et la sécurité de l'emploi. Mais, tous les travailleurs en ont fait l'expérience, les patrons ne sont responsables que vis-à-vis de leurs actionnaires.

Depuis la rentrée de septembre, ce tract est la première proposition de réponse collective aux attaques du patronat et du gouvernement que la CGT propose à ses militants. En cela, il répond à une attente de bien des militants. Mais son contenu ne peut que les laisser sur leur faim. Non seulement parce que ses propositions restent vagues, mais aussi et surtout parce qu'il ne dit pas ce que la CGT propose pour contraindre le gouvernement et le patronat à reconnaître les droits des travailleurs, ni par quelle voie elle envisage de redonner moral et combativité à l'ensemble de la classe ouvrière. Cela ne peut sans doute pas se faire en un jour. Mais puisqu'il s'agit d'envisager les mesures à mettre en oeuvre, pourquoi s'arrêter en chemin et ne pas dire comment on compte y parvenir?